MICHEL LE TELLIER ET LOUVOIS

PREMIÈRE PARTIE. — LES HOMMES, LEURS RELATIONS

 

CHAPITRE V. — LE PÈRE ET LE FILS (AOÛT 1668-JANVIER 1674).

 

 

Pendant plusieurs années, après la paix d'Aix-la-Chapelle la tranquillité intérieure et extérieure règne. Cette pacification générale favorise l'ambition de Louvois, en reléguant les militaires au second plan, en leur enlevant même toute influence. Débarrassé, tout au moins momentanément, des adversaires de l'administration civile, le fils de Le Tellier s'adonne avec ardeur à sa tâche personnelle et, constamment en contact avec le roi, accroît de plus en plus son crédit. Fort habilement, son père continue à le laisser agir en toute indépendance, même dans des affaires dont il avait eu, auparavant, à s'occuper lui-même, n'intervenant qu'avec discrétion, mais réapparaissant toujours pour se substituer à son fils et le remplacer lors de ses absences ou d'une maladie. Il est, ainsi, sans cesse à côté de lui, travaille avec lui, écrit des minutes, signe des expéditions[1], en d'autres termes le surveille étroitement pour lui éviter un faux pas, une manœuvre imprudente. Mentor, loin d'être dépossédé, reste présent et en éveil.

 

I. — Le secours de Candie, 1669.

Deux affaires anciennes, dont Le Tellier avait dû déjà rechercher la solution, réapparurent et furent, cette fois, du domaine de Louvois : le secours de Candie en 1669, la reprise des différends avec Charles IV de Lorraine, de 1667 à 1672.

Depuis qu'en 1662 le corps français envoyé en Crète n'avait obtenu aucun résultat heureux, la situation avait fort empiré à Candie. Grâce à une avance lente, mais progressive, les Turcs avaient mis le siège devant la ville et la pressaient vivement en 1668. La république de Venise demanda donc un nouveau secours à la France. La guerre de Dévolution n'étant pas encore terminée, Lionne fut réservé, Le Tellier et Louvois hostiles. Après le traité d'Aix-la-Chapelle, la question fut reprise et sur l'initiative du pape : le 22 janvier 1669, le nonce Bargellini notait la bonne disposition de tous les ministres, de Louvois lui-même[2]. Il ne déplaisait pas à Louis XIV de se poser en protecteur de divers états de l'Europe.

Il avait résolu d'envoyer à Candie un corps de 6.000 hommes, commandé par le duc de Navailles[3]. L'intendant serait un cousin de Louvois, De La Croix, qu'il avait envoyé à Tournai pour les contributions et les fortifications et qui, dans cet emploi, lui avait donné toute satisfaction[4]. Le célèbre Jacquier était chargé de fournir les vivres[5]. Pour rendre le corps non seulement plus nombreux, mais plus valeureux et plus capable. Louvois fit appel aux officiers réformés, entretenus à la suite dans les garnisons. Il a beau dire que tous veulent marcher, même les officiers de pied : il n'en constate pas moins avec amertume que certains montrent peu d'empressement de servir le roi. N'en ayant pas parlé au souverain pour ne pas leur porter préjudice, il préfère user d'un expédient : Il vaut mieux, dit-il, les obliger à faire leur devoir que de les perdre. Je vous prie d'en commander huit et de les faire partir pour se rendre ici[6].

L'expédition se prépare avec quelque lenteur. En mai, Louvois partant pour une inspection en Flandre, M. Le Tellier se donnera la peine de vous faire savoir les intentions du roi durant ce temps-là pour les choses qui pourront survenir[7]. Arrivé à Toulon, Navailles annonce donc son départ à Le Tellier et l'informe de l'état assez peu satisfaisant des troupes[8], qui, du 5 au 20 juin, furent transportées à Candie par les navires du duc de Beaufort.

L'échec fut complet : attaque inutilement meurtrière par terre le 25 juin, bombardement vain et désastreux par la flotte le 24 juillet. Le 31 août, considérant que Candie ne pouvait être sauvée, Navailles rembarquait ses régiments. Depuis onze jours, Louvois était informé par son rapport du résultat de la première attaque. Se référant aux amples instructions dont il avait muni Navailles, il lui répétait de songer tout d'abord à ne rien faire d'indigne au maitre que vous avez l'honneur de servir, mais qu'après cela tout votre soin doit être de vous appliquer à la conservation des troupes et des officiers qui les commandent[9]. Quand on apprit la retraite de Navailles, l'honneur du maître parut fort atteint. Sur l'ordre de Louis XIV, Le Tellier, Lionne et Colbert durent lui donner leurs avis après examen des lettres arrivées de Candie. Car l'ambassadeur vénitien et le nonce vont venir se plaindre de Navailles et demander l'envoi de nouveaux renforts : d'après le roi, il faudrait rejeter la faute sur les Vénitiens et sur l'insuffisance des vivres à Candie[10]. Après avoir entendu la lecture du mémoire dressé par les trois ministres, Louis XIV ordonne de rassembler en Provence des troupes, qui seront commandées par le maréchal de Bellefonds : en effet, Sa Majesté a cru ne pouvoir se disculper avec succès china le monde du retour de M. de Navailles qu'en faisant aller ces troupes en Candie[11]. Ces mesures déconcertèrent Colbert et l'irritèrent contre Louvois, destructeur de l'équilibre financier : Vous jugerez facilement que ces grandes sommes extraordinaires et qui ne sont point comprises dans les dépenses réglées ne peuvent pas être trouvées facilement[12]. Heureusement pour le trésor royal, le premier contingent des rapatriés débarqua à Toulon le 29 septembre et, peu après, la capitulation de Candie rendit inutile l'envoi d'un secours[13].

L'émotion, suscitée dans l'entourage royal, psi ce retour précipité, souleva contre Navailles de fort vives colères. Lionne ne parla de rien de moins que de le faire arrêter pour l'envoyer au souverain pontife qui le jugerait comme il l'entendrait. Mais M. Le Tellier para le coup, raconte Rose, remontrant de quelle conséquence il serait de soumettre les sujets du roi et même ceux de cette qualité à la juridiction du pape[14]. Navailles dut subir un exil assez long, d'où Le Tellier tirera celui dont il avait apprécié le mérite et la fidélité au temps de Mazarin.

 

II. — L'affaire de Lorraine, 1667-1672.

Avec Charles IV de Lorraine, la solution des difficultés demanda plus de temps[15]. Après le traité de Nomény, le duc s'était tenu assez tranquille, continuant cependant à lever des soldats et de l'argent, mais avec précaution et sans excès. En' novembre 1667, d'Aubeville, cousin de Le Tellier, fut envoyé à Nancy pour traiter avec lui et le rappeler au respect des conventions. Il rend compte de ses premiers efforts à Le Tellier d'abord, le duc traînant en longueur les pourparlers et ne donnant jamais une réponse positive[16]. Il le décida toutefois à fournir à Louis XIV, pendant la guerre de Dévolution, des troupes, moyennant un subside. Mais, quand la signature de la paix est en vue, Louvois, alors à Tournai, voudrait bien épargner les dix mille pistoles que M. d'Aubeville a ordre de donner à M. de Lorraine, et, puisque la négociation sur ce sujet n'est pas prête à conclure, il vaudrait mieux la retarder. Adoptant cette opinion, Le Tellier prévient sans retard le diplomate français[17].

Aussitôt après, les choses se gâtent, Charles IV, au mépris des traités, gardant tous les effectifs sous les armes. Un mémoire est donc adressé à d'Aubeville pour rappeler au duc ses engagements et le menacer de la force du roi de France[18]. En même temps, annonce Louvois, est constitué un corps de six mille chevaux et de six mille hommes de pied. Et, si Son Altesse est assez mal conseillée pour ne pas suivre les intentions de Sa Majesté, les gardes françaises et suisses sont commandées pour marcher au premier ordre avec 2.000 chevaux de la maison du roi : le maréchal de Créqui part pour commander ces troupes, 4 janvier 1669[19]. L'intendant de Flandre, Le Pelletier de Souzy, pensait qu'il était dommage de fatiguer de si belles troupes inutilement. Car on savait bien que le duc ne pourrait pas résister : ce n'est pas, ajoutait-il cependant, qu'il faut demeurer d'accord que la marche d'une armée de 15 à 20.000 hommes abrège fort une négociation avec un prince aussi difficile que l'est M. de Lorraine[20]. Il se rencontrait ainsi avec d'Aubeville, approuvant l'envoi d'une armée pour obliger le duc à satisfaire Louis XIV, et Dieu veuille encore que l'approche des troupes de Sa Majesté suffise pour cela[21]. Louvois avait prescrit à Créqui, que, par toutes sortes d'actes d'hostilité, vous obligiez M. de Lorraine à désarmer et à réduire son infanterie et sa cavalerie[22]. Charles IV s'inclina aussitôt, à la fin de janvier 1669.

Tout en croyant qu'il se soumettra à la volonté du roi, le maréchal se méfie de son esprit fécond en délais : il juge que M. de Lorraine, par sa nature, ne se contiendra jamais, de sorte qu'au moment qu'il s'émancipe, il faut le tenir dans son devoir[23]. Dès le mois d'avril se produit cette émancipation. D'Aubeville ne cesse de constater les infractions commises Par Charles IV, levées de soldats un peu partout, jusqu'en Franche-Comté et en Luxembourg, exercice imposé aux paysans lorrains, etc.[24] Il ne croit nullement aux dénégations répétées du prince. Tout d'abord, Louvois lui répond froidement : Il n'est que trop vrai que Son Altesse ne tient pas la parole qu'Elle a donnée à Sa Majesté de n'en (troupes) retenir aucunes que celles dont l'on est convenu[25]. Mais le rappel du diplomate, qui quitte Nancy en décembre, fait prévoir que l'on arrive insensiblement à l'intervention armée.

Elle se fera longtemps attendre encore. Le duc ne s'amendant pas, des troupes sont réunies non loin de Versailles. Avec elles, Louvois part, le 27 août 1670, pour les accompagner jusqu'à Reims et il ne les quittera que le 3 septembre[26]. Pendant son absence, il est prescrit aux ingénieurs des places flamandes qu'en cas qu'il survienne quelque chose d'extraordinaire dans les fortifications ou dans les autres affaires de votre département, vous pourrez en informer Monseigneur Le Tellier qui en rendra compte au roi[27]. Tandis que le corps d'armée, dont l'intendant est le neveu de Le Tellier, Gilbert de Saint-Pouenges, avance vers l'est, des cavaliers entrent brusquement dans Nancy le 26 août. Prévenu, le duc avait pu s'échapper : il se réfugia dans certaines de ses places d'abord, à l'étranger ensuite. Comme il n'était pas en état de résister, Créqui s'empara sans peine d'Epinal, de Châté et de Longwy[28]. Charles IV avait fait ses adieux en homme qui abandonne pour quelque temps son pays[29], dit le maréchal.

Il ne devait plus y revenir. La politique de Louis XIV à l'égard de la Lorraine avait changé et Louvois l'explique sans ambages le 12 septembre 1670 : Les soumissions de M. de Lorraine ont pu lui être utiles autrefois, quand le roi le connaissait moins qu'il ne fait présentement. Mais, à l'heure qu'il est, elles lui seront entièrement inutiles et le roi a résolu de se voir entièrement maître de la Lorraine auparavant que de penser à ce qu'il en fera[30]. Le 30, cette réserve finale disparaît complètement et les véritables intentions se dévoilent : Il est bien vrai que le roi a été jusques à cette heure en résolution de rendre la Lorraine, sinon à M. le prince Charles[31], au moins à un des princes de la maison. Mais présentement que les places se défendent, je doute que Sa Majesté persiste dans la même résolution ou du moins qu'Elle l'effectue si tôt[32]. Le 19 novembre enfin, la pensée est catégoriquement précisée : Le roi ne considère point la Lorraine comme un pays qu'il doive sitôt quitter et il y a apparence que, connaissant tous les jours de plus en plus combien cette province sera bonne à unir à son royaume, il cherchera des expédients pour se la conserver[33]. D'autre part, ce pays constituait un excellent point de départ dans le cas d'une guerre avec la Hollande[34]. Les soldats campèrent donc dans la Lorraine, et, afin de les maintenir dans l'ordre, Le Tellier approuva la nomination d'inspecteurs pour la cavalerie et l'infanterie, recommanda à Créqui la reconstitution, par leurs capitaines, des compagnies trop faibles[35].En outre, en avril 1671, Louvois se rend à Donchéry pour examiner l'état réel des troupes, qui doivent être transportées en Flandre : mais la majeure partie logera dans le pays[36].

Ainsi, dès la fin de 1670, la question lorraine est résolue : elle restera en l'état jusqu'au traité de Ryswick[37].

 

III. — Louvois inspecteur général, Le Tellier intérimaire, 1668-1671.

Telles sont les deux affaires de politique extérieure que Louvois, après Le Tellier, eut à résoudre. D'importance minime en somme, elles montrent cependant que le fils s'est substitué au père et que, grâce au bon vouloir de l'un, l'autre a liberté d'allure. Les positions se trouvent donc renversées. Dans les registres de l'administration militaire, la mention indicatrice n'est plus celle relative à Louvois, mais celle relative à son père : au verso des minutes que celui-ci dicte ou écrit, on peut lire en effet les mots Monseigneur Le Tellier[38]. Ou bien encore, si, dans un registre, toutes les minutes sont du père, on constate qu'elles se rapportent non aux affaires de la guerre, mais à des matières diverses, recommandations, remerciements, dons à des religieux, félicitations, protestantisme, etc.[39]

Bien plus précieux encore sont les renseignements fournis par les voyages qu'effectua Louvois de 1668 presque jusqu'au début de la guerre de Hollande. Reprenant une méthode inaugurée autrefois par Le Tellier, le jeune ministre a établi, dans la région flamande, où les frontières bizarres forment des angles rentrants et sortants, des intendants de contributions et de fortifications. Il va d'abord inspecter fréquemment les immenses travaux, surveillés par eux et entrepris pour mettre en état les places fortes du nord. Puis, il étend plus loin ses voyages, va dans l'est, dans le sud-est. Pour d'autres raisons, politiques surtout, il suit le roi dans ses déplacements ou encore se rend à l'étranger pour négocier des traités politico-militaires. Pendant toutes ces absences, il écrit à Le Tellier des lettres longues et intéressantes. Le père, qui le remplace toujours, répond par des missives, qui, malheureusement pour l'historien, manquent trop souvent. Cette correspondance constitue l'élément indispensable, essentiel, pour étudier et démêler le vrai caractère des rapports entre les deux hommes. Certes ce n'est pas une pensée personnelle, originale, de Louvois qui lui fait entreprendre ces tournées d'inspection, pour se rendre compte et combler les lacunes de son instruction professionnelle. Après la Fronde déjà Le Tellier avait agi de même seule la guerre contre l'Espagne l'empêcha de multiplier ces visites pratiques[40]. Mais les absences du fils permettent au père de reprendre, plus ou moins longuement, sa place au secrétariat d'état de la guerre et d'en assumer, comme avant, la direction, à titre intérimaire maintenant.

Pendant les années 1668 et 1669, Louvois effectua trois inspections en Flandre. Dans la première, parti le 21 août 1668, il visita Arras, Saint-Venant, Dunkerque, Lille, Tournai, Ath, Charleroi, Philippeville : le 7 septembre, il est de retour à Saint-Germain, ayant refusé toute cérémonie parce qu'il n'a pas de temps à perdre[41]. Ce court voyage n'a nécessite aucune intervention de Le Tellier. Du 18 mai au 4 juin 1669, Louvois passe à Bapaume, Arras, Douai, Tournai, Lille, Dunkerque, Bergues, Furnes, Courtrai, Oudenarde, Ath et Charleroi, toutes les places de Flandre[42]. Il écrit à Le Tellier quatre lettres d'affaires sur l'état des forteresses et des garnisons, pour que son père soit en mesure d'en rendre compte au roi. Il convoque les intendants Robert, Charuel, Talon, Cartier, les ingénieurs, Vauban avec lequel commence alors sa liaison, les chefs militaires. Il passe en revue les soldats, se promenant dans tous les rangs, constate qu'ils sont le plus souvent lestes, adroits, dans certains régiments tous vêtus et armés d'une même façon, gourmande les capitaines dont les compagnies sont mauvaises. Sauf à Bergues, l'infanterie est bonne : la cavalerie, en général, ne le satisfait pas, et il faudrait trouver quelque M. Martinet (pour ainsi dire) pour réveiller un peu les officiers qui s'endorment autant que l'étaient les officiers d'infanterie pendant la précédente paix. Les casernes de Douai sont très belles : les huttes de Tournai, confortables.

Louvois triomphe et ne peut dissimuler son contentement quand il parle des fortifications. La citadelle de Tournai est d'une beauté surprenante, le plus bel ouvrage qui ait jamais été entrepris, le mieux exécuté et enfin digne de celui qui l'a fait faire. Celle de Lille est la plus belle maçonnerie que l'on puisse voir et les Romains n'ont jamais exécuté rien de comparable à ce qui s'est fait à Dunkerque. Les Anglais et les Hollandais envoient des observateurs, qui s'en retournent tous remplis d'admiration du succès du travail et de la grandeur du maître qui a osé l'entreprendre[43]. Même en tenant compte de la flatterie à l'égard de Louis XIV, if est impossible de nier la valeur extrême de ces lettres, renseignant avec une exactitude précise et détaillée sur la situation de l'armée dans le nord et prouvant la compétence désormais acquise et l'activité-laborieuse de M. le marquis de Louvoy, qui, mieux que mortel sur la terre, entend le tracas de la guerre[44]. Pendant ce temps, Le Tellier avait la charge agréable de lire au roi toutes ces bonnes nouvelles, mais aussi celle, plus lourde, de s'occuper, du 20 au 30 mai, du secours de Candie[45]. Il n'en fut pas ainsi, quand Louvois, après avoir séjourné à Chambord avec le roi et la cour, repartit le 23 octobre vers le nord. Il fit le voyage en sens inverse par Le Quesnoy, Ath, Tournai, Dunkerque, Lille et Arras. Le 7 novembre, il écrivait de nouveau de Saint-Germain[46]. Il n'y a pas, alors, de correspondance entre le père et le fils : les indications manquent.

Jusqu'à ce moment Louvois avait habité dans l'hôtel de son père, rue des Francs-Bourgeois[47]. En 1669, revenu de son premier voyage de Flandre, il acquit, le 8 juin, de Basile Fouquet son hôtel, compris entre les rues Richelieu et Sainte-Anne, avec cours, grand jardin, etc. L'acheteur, conseiller du roi en tous ses conseils, secrétaire d'état et des commandements de Sa Majesté, versa 160.000 livres, ainsi réparties : 20.000 à Basile Fouquet, 41.261 livres 5 sols à l'abbé de Saint Victor créancier, 98.738 livres 15 sols aux Monceaux, précédents propriétaires et créanciers, eux aussi[48].

L'année 1670 fut beaucoup plus prise encore par les voyages, parfois dictés par des considérations non-seulement militaires, mais politiques. Au printemps, le roi résolut, d'après Louvois, de visiter toute la frontière du côté des Flandres[49]. A ce programme officiel s'en ajoutait un autre secret, celui de conduire à Dunkerque Henriette d'Orléans, qui, allant à Douvres, voir son frère Charles II, signerait avec lui le traité d'alliance, depuis longtemps négocié. Louis XIV voulant être suivi de toute sa cour et de la maison militaire, Louvois dut dresser avec le plus grand soin l'itinéraire : aussi ses recommandations aux intendants, commissaires des guerres, gouverneurs des places sont-elles et nombreuses et d'une extrême minutie. Par exemple, comme des courtisans devront être logés dans les casernes, il faudra retirer à l'abri les lits et les meubles des soldats, sans quoi il s'en dissiperait une fort grande quantité. On a envoyé un buste du roi : il faut le mettre en lieu où personne ne puisse y toucher. Les intendants sont chargés de faire raccommoder les chemins par les communautés, construire des ponts sur les ruisseaux et vérifier eux-mêmes qu'ils soient assez solides pour porter avec sûreté tous les fardeaux qui passeront dessus. Qu'il y ait des bouchers, des boulangers et vivandiers à la queue des camps pour éviter aux soldats d'entrer dans les villes, ce qui autrement causerait une terrible confusion. Enfin, à Saint-Quentin, on enlèvera les poudres du magasin pour qu'elles ne soient proches du logis du roi et on les fera garder par les habitants les plus sages, sans armes à feu, n'ayant que des piques ou des hallebardes.

Le voyage dura du 28 avril au 10 juin environ[50]. Pendant le séjour à Dunkerque, Pomponne, ambassadeur en Hollande, avait été appelé par le roi et informé par lui de l'alliance anglaise et de la résolution de déclarer en 1671 la guerre aux Provinces-Unies[51] : d'après lui, seuls furent dans le secret le roi, Madame, Le Tellier, Lionne et Colbert[52]. Les trois ministres étaient restés en France, discutant de concert la grande affaire. Colbert proposant de payer à Paris, pour perdre moins, les trois millions convenus, Louis XIV lui répond qu'avant tout il ne faut pas échotier : Dites à Lionne ce que je vous mande et voyez tous trois ensemble ce qu'il y aura à faire. Le Tellier n'est pas nommé : pourtant il s'agit bien de lui, qui expédie les affaires courantes pendant ce long voyage[53].

Sitôt revenu à Saint-Germain, Louvois songe à repartir, cette fois du côté des Alpes. Reprenant le projet de son père de rendre la forteresse de Pignerol inexpugnable, il voulait examiner en personne l'état des murailles, l'établissement, jusqu'alors difficile, d'une fonderie, bien visiter toutes choses[54]. désira donc emmener avec lui Vauban., qui dut revenir de Flandre en poste. Pour aller vite, il interdit toute cérémonie à Pignerol : Je ne désire pas non plus que qui que ce soit vienne au-devant de moi. Il avait ordonné la réunion de nombreux chevaux, parce que je crois que je courrerai à 17 ou 18 chevaux. Parti le 1er août[55], il séjourna à Pignerol du 8 au 10. Après avoir poussé jusqu'à Turin, il salua le duc de Savoie à Saluces et lui laissa Vauban pour visiter pendant un mois et demi des places piémontaises et en faire des dessins pour S. A. R. Il était de retour à Saint-Germain le 22 août[56].

Ayant passé deux mois auprès du roi, Louvois se résolut à inspecter les places françaises du Hainaut et de la Flandre, pour voir où en étaient les travaux de fortification et, au besoin, les activer. Pendant une dizaine de jours, 5-15 novembre, il se rendit successivement à La Capelle, Marienbourg, Oudenarde, Tournai, Lille, Douai et Arras[57]. Avant son départ, il avait mandé à Créqui, en Lorraine, que, pendant son absence, M. Le Tellier rendra compte au roi de ce que vous lui manderez et il vous fera savoir ses intentions. Effectivement, le ministre écrit sur les affaires lorraines, le 10 novembre, au maréchal et aux intendants Charuel et Choisy[58].

Sans nul doute, l'inspection ne procura-t-elle à Louvois aucune satisfaction : les travaux n'étaient pas suffisamment avancés pour que la guerre contre la Hollande pût être déclenchée en 1671, comme il avait été prévu. Il était nécessaire d'augmenter le nombre des travailleurs, et, pour cela, d'utiliser les soldats. En prévision de leur venue en Flandre et de celle du roi, toujours accompagné de la cour, le ministre, à l'avance, prépara tout minutieusement[59]. Bannir les comédiens tant que les troupes séjourneraient dans le nord, trouver à Dunkerque pour Louis XIV un logement meilleur que le précédent, rechercher aussi une combinaison pour les appartements de la reine et des favorites La Vallière et Montespan, tout cela était, en somme, assez aisé. Mais Louvois tint à préciser le caractère particulier du voyage royal. Pour éviter toute dépense au peuple, sont interdites les cérémonies officielles, les entrées solennelles, les harangues de magistrats et de prélats : il s'agit uniquement d'un voyage d'affaires, de travail, et non de divertissement.

Lui-même va donner l'exemple et, au début d'avril 1671, commence cette expédition qui durera jusqu'au 20 juillet et aura un grand retentissement en Europe. Arrivé à Donchéry sur la Meuse, Louvois prend en quelque .sorte en charge les troupes, qui étaient en garnison dans la Lorraine, et il les mènera jusqu'à Dunkerque[60]. Au Gours de cette longue marche, il informe amplement le roi et il écrit aussi, mais avec plus d'abandon, à son père[61]. Le 12 avril, il le remercie des nouvelles envoyées par lui et qui lui permettront de prendre en patience la vie que je mène ici, qui me serait infiniment désagréable, si le maître ne connaissait pas la manière dont on le sert. J'espère, ajoute-t-il, faire toujours de mieux en mieux et ne lui donner point lieu de perdre la satisfaction qu'il témoigne avoir de mes services[62]. Le 17, il demande à Le Tellier des précisions sur le mécontentement du prince de Condé : Ayez la bonté de me faire savoir s'il y a quelque chose de nouveau là-dessus. Mais il ne s'attarde pas, parce qu'il est accablé d'affaires et que tout va autant bien que je le puis désirer[63]. Il regrette que la maladie ait empêché son père de se mettre en chemin avec le roi, qui arrive le 7 mai à Dunkerque. Il le supplie d'envoyer de Boulogne un de vos gens en poste pour m'avertir du temps précisément que vous arriverez à Gravelines ; il ira le rejoindre pour l'entretenir, auparavant que vous arriverez ici, de choses qu'il sera bon que vous sachiez[64]. Il ne s'agit pas, en effet, seulement de faire remuer la terre au point que les soldats appelleront cette année l'année des brouettes, mais surtout de décider définitivement de la guerre de Hollande, Lionne et Colbert sont avec Louis XIV : Pomponne a été convoqué dès le 24 avril : Le Tellier, parti de Paris le 13 mai, arrive à son tour, le 16, à Dunkerque. Un conseil est tenu, au cours duquel la guerre contre les Provinces-Unies est décidée[65]. Désormais Le Tellier suit le roi dans ses déplacements il est de retour à Saint-Germain le 16 juillet et son fils le 20[66].

Ainsi, tous deux sont restés étroitement associés, comme avant. Le Tellier sert d'intermédiaire autorisé et respecté entre le souverain et Louvois. Celui-ci, déférent, recherche ses conseils, le renseigne dans les circonstances graves pour qu'il ne soit pas pris au dépourvu. Cette collaboration va continuer et se développer.

 

IV. — Louvois et Le Tellier aux affaires étrangères, septembre 1671-janvier 1672.

Selon Gourville, c'est à Dunkerque que Louvois commença à vouloir dire son avis sur les affaires étrangères[67]. En réalité, il fut entraîné vers ce nouveau domaine, non par un désir personnel ou une volonté réfléchie, mars par les événements. Lionne étant mort le 1er septembre 1671 et Louis XIV ayant choisi Pomponne pour lui succéder, Louvois fut désigné pour exercer par intérim jusqu'à l'arrivée du nouveau secrétaire d'état, alors ambassadeur en Suède[68]. D'après plusieurs contemporains, il se serait acquitté de ces fonctions dignement, avec beaucoup d'habileté et d'application[69]. Est-ce l'impression que donnent les documents conservés au ministère des affaires étrangères[70] ?

Louvois s'empresse d'informer les représentants de la France à l'étranger de sa nouvelle commission[71]. Mais sa correspondance avec eux est loin d'être égale et en nombre et en importance.

Avec la Turquie, Venise et le Portugal, les relations sont sinon nulles, du moins extrêmement restreintes[72]. Pour l'Angleterre, on ne peut avoir une opinion fondée, les lettres de Louvois manquant[73]. En Hollande, la France est représentée, depuis le départ de Pomponne pour Stockholm, par un agent officieux : le ministre lui enjoint de lui adresser des indications plus nombreuses et plus certaines, mais ne lui mande aucune instruction précise[74].

En Prusse est envoyé, comme ambassadeur extraordinaire, le comte[75] de Saint-Géran, le 30 novembre. Il est chargé de pousser l'électeur de Brandebourg à s'allier avec la France, ou, à défaut, à rester neutre dans le conflit franco-hollandais[76]. Les hésitations de Frédéric-Guillaume et ses agissements à l'égard  de l'électeur de Cologne ont le don d'irriter Louvois, qui menace d'envoyer des troupes pour protéger l'archevêque, et espère ainsi forcer le Brandebourgeois à prendre le bon parti, nécessaire pour la conservation de ses états et de ses peuples, qui sont voisins du Rhin[77]. Le ministre français n'a pas plus de confiance dans l'électeur-archevêque de Mayence : l'abbé de Gravel doit le surveiller étroitement, l'empêcher de s'unir à Frédéric-Guillaume, le remettre dans le droit chemin : si le roi n'entretient pas de bons rapports avec lui, ce prélat n'a qu'a s'en prendre à lui-même[78].

Avec le duc de Savoie, la contestation porte principalement sur un édit de ce prince interdisant les levées de soldats dans ses états. Louvois proteste énergiquement, faisant ressortir à Saint-Maurice, ambassadeur de Savoie en France, la gravite de cette attitude[79].

Entre les cours de Madrid et de Versailles, outre des affaires particulières, le débat concerne les exactions et les sévices commis par les Espagnols sur la frontière flamande, la mauvaise conduite et les discours emportés du gouverneur des Pays-Bas, Monterey. Toutefois, la question capitale est celle du traité à conclure, s'il est possible, avec l'Espagne. De là l'envoi du marquis de Villars, muni d'une instruction du 21 octobre, mais plus amplement renseigné par les lettres des 22 et 29 novembre, qui exposent les raisons essentielles à invoquer dans cette négociations[80].

La papauté ne cause pas beaucoup de souci à Louvois, dont les missives, nombreuses, ne présentent pas d'intérêt général : il s'agit, presqu'uniquement, de la promotion au cardinalat de l'évêque de Laon, César d'Estrées, et de l'arche.- vaque de Toulouse, Pierre de Bonsi. Malgré l'insistance de la France, le souverain pontife ne se montre guère favorable[81], pour l'instant.

En Suède, Louvois correspond avec Pomponne, Courtin et Vaubrun[82]. Au premier il annonce la nomination du second comme ambassadeur à Stockholm et résume l'instruction du 17 octobre[83]. Il le supplie de hâter la conclusion de la ligue avec la Suède : Je ne puis m'empêcher, dit-il, de vous conjurer de faire diligence pour me délivrer d'un emploi dont vous vous acquitterez infiniment mieux que je ne puis faire et qui me pèse infiniment à cause de la quantité d'affaires que me donnent les préparatifs qu'il faut faire pour l'année qui vient[84]. Il dépêche Courtin et, celui-ci étant tombé malade en route[85], le marquis de Vaubrun en poste. Puis, toutes ces mesures n'accélérant pas le retour de l'ambassadeur, il abandonne les affaires étrangères pour aller sur les bords du Rhin et les transmet à son père, le 23 décembre.

Comme Louvois, Le Tellier désirait l'arrivée rapide de Pomponne, mais pour d'autres raisons. Il craignait qu'en matière de politique extérieure, Louvois ne fit quelque pas de novice, disant qu'il n'était ni instruit ni expérimenté, qu'il était assez occupé et embarrassé en celles de la guerre et qu'enfin il n'avait que trente ans[86]. Vraisemblablement, le père n'avait épargné ni l'aide ni les conseils à son fils. Ce dernier parti, il lui succède et tient correspondance avec l'évêque de Laon, l'abbé de Gravel à Mayence, Courtin et Rousseau en Suède[87]. Il remet les services à Pomponne le jour de son arrivée à Paris, le 15 janvier 1672.

On ne peut certes pas soutenir que la politique extérieure de la France a été très active pendant les derniers mois de 1671.

 

V. — Louvois ministre d'état, janvier 1672.

Tout était alors tourné vers les préparatifs militaires contre la Hollande. Comme ils sont fort avancés, il est urgent de se procurer le libre passage des armées et des munitions vers le Rhin, puisque la .traversée des Pays-Bas espagnols est impossible. Tel est le motif de l'impatience de Louvois qui, depuis octobre, songeait à ce prétendu voyage en Flandre et demandait à un commissaire de lui indiquer la meilleure route pour aller à Cologne[88]. Au mois de décembre, le départ de M. de Pomponne se différant de jour en jour, il prévient le prince de Furstenberg qu'il partira d'Ath pour m'en aller au pays où vous êtes, où je serai bien aise... de conférer avec vous et avec M. votre frère sur tout ce qui est à faire pour l'exécution du grand et glorieux dessein de Sa Majesté[89]. Peut-être aussi Louvois n'était-il pas fâché de jouer encore au ministre des affaires étrangères, et. de conclure sans délai un traité politique et militaire. D'ailleurs, depuis trois mois, il avait pris les mesures propres à gagner les prélats rhénans, toujours besogneux et avides. Le commissaire Magloire avait quitté Paris avec une somme en or qu'il est de conséquence que l'on fasse passer au plus tôt dans l'électorat de Cologne, et toutes sortes de précautions furent prises pour qu'il ne survint aucun incident dans le transport à Bonn de cet argent si impatiemment attendu[90].

Le terrain ainsi déblayé, Louvois, le 21 décembre, écrit au prince de Furstenberg, frère de l'archevêque de Cologne : Je pars à trois heures après midi pour m'en aller en Flandre[91]. Tenant à ce que le secret soit observé, il ne veut pas d'accueil qui paraisse aux yeux du public ni de logement princier, parce que le plus borgne cabaret de la ville sera le meilleur pour qu'on me connaisse moins[92]. Le Hainaut traversé, il arriva à Brühl, prés de Cologne, le 31 décembre sur les neuf heures du matin, après avoir entretenu le sieur Verjus dans le chemin depuis Aix-la-Chapelle jusques ici. Mais, contre son attente, son incognito avait été percé : Il y a trois jours que les pages de M. de Strasbourg étaient informés que je devais arriver[93].

Au cours de ce voyage s'établit le régime épistolaire entre Louvois et Le Tellier, qui le remplace jusqu'à la fin de janvier 1672[94]. Le fils décrit l'état des troupes qu'il a vues à Arras, s'inquiète que le munitionnaire Jacquier n'arrive pas, que le fournisseur de poudres Berthelot manque d'argent, etc. Pendant ce temps, il négocie avec des princes ignorants, irrésolus, faméliques ou aimant trop à boire. Le 2 janvier, il a fort avancé avec l'électeur de Cologne, le 4 avec les évêques de Munster et de Strasbourg. Mais, ces prélats ayant besoin encore de réflexion, il ira à Metz et reviendra ensuite à Brühl pour conclure définitivement[95]. Il en a terminé le 19 janvier[96] : neuf jours plus tard, il arrivait à Versailles. Sa mission avait réussi. L'électeur de Cologne livrait deux de ses places, accordait des quartiers d'hiver à la gendarmerie et à la cavalerie légère[97], laissant passage aux Français quand ils iraient attaquer les Hollandais.

Sans nul doute, la situation de Louvois s'est améliorée, est devenue très forte. Il s'est assuré la faveur du roi par son zèle, son dévouement et, aussi, par sa puissance de travail, son esprit d'organisation et sa compétence. Il plaît surtout à Louis XIV, parce que, jeune comme lui, glorieux comme lui, il sait le faire parler en maitre. Tandis que la simplicité presque humble de Pomponne lui sera rapidement déplaisante, la vigueur hautaine et exigeante du langage de Lionne lui avait agréé, parce qu'avec ce ministre la majesté royale se manifestait constamment. Il en fut ainsi de Louvois, que, d'ailleurs, il n'hésitait pas à rabrouer vertement quand il devenait trop envahissant. Il l'avait déjà récompensé en le nommant général des postes en décembre 1668 et chancelier de l'ordre du Saint-Esprit, en janvier 1671. Lorsque Louvois revint de Cologne, Louis XIV méditait-il de lui accorder de nouvelles faveurs ? Peut-être. Un événement, depuis longtemps prévu, l'y décida. Le 28 janvier, jour où Louvois arrivait à Versailles, mourait le chancelier Séguier. Sa succession donna lieu à des intrigues, souleva une fort vive opposition à la nomination attendue de Le Tellier[98]. Louis XIV prit une résolution habile. Il garda pour lui les sceaux : en avril, il ne désignera qu'un garde des sceaux. En échange il nomma Louvois grand vicaire de l'ordre de Saint-Lazare et ministre d'état. Le 1er février 1672, Louvois prit séance au conseil[99]. Le père ne fut peut-être pas fort satisfait d'être en quelque sorte évincé. Mais il fut assurément heureux de voir son fils recevoir un tel témoignage de la part du roi et de constater aussi, que, dans le conseil, il y aurait deux Le Tellier en face d'un Colbert et d'un Pomponne.

 

VI. — Les débuts de la guerre de Hollande.

Cette éclatante ascension, cette activité sans arrêt et concentrée, à peu près uniquement, sur des objectifs militaires expliquent l'opinion des contemporains, regardant Louvois comme l'auteur principal des hostilités contre les Provinces.-Unies. Le Pelletier attribue la conduite du ministre à un motif très élevé : Il imagina, dit-il, la guerre de Hollande, et sur le fondement de réduire cette puissance, laquelle s'opposait seule à la grandeur de la France[100]. Les autres, au contraire, invoquent, pour la plupart, les intérêts particuliers du ministre, son désir d'accroître encore son crédit par la guerre et de diminuer celui de Colbert, et même d'augmenter ses revenus par le pillage[101]. Il conviendrait, je crois, d'insister surtout sur les intentions belliqueuses et orgueilleuses de Louis XIV[102]. Comme le père, le fils ne put qu'approuver la politique du souverain et se conformer 'à ses volontés, qu'il ne lui avait certes pas dissimulées.

Dans les derniers mois de 1670, en effet, Louvois enjoignit à Saint-Pouenges de veiller à la conservation de l'infanterie, qui campait en Lorraine, parce que Sa Majesté est persuadée qu'Elle en aura à faire au printemps[103]. Par suite du faible avancement des travaux des fortifications, la guerre fut retardée d'un an. Mais, dès août 1671, on tenait pour certain à Bruxelles qu'on aura la guerre l'année prochaine[104]. Tout en cherchant à savoir si les Hollandais augmentaient leurs effectifs[105], Louvois faisait étalage à son ami. Vauban de l'importance des levées nouvelles, 16.000 chevaux et 40.000 fantassins, et, plus encore, de la quantité immense de boulets et munitions de guerre, que l'on voiture en même temps dans de nombreuses places du nord de la France[106]. Enfin, après avoir annoncé à Chamilly, commandant des troupes dans l'électorat de Cologne, que les hostilités vont éclater[107], il informe en des termes précis l'ambassadeur français à Londres, Colbert de Croissy : Je reçus hier commandement du roi d'expédier la déclaration de la guerre contre les Hollandais. Je la lui lirai ce matin et l'enverrai, en sortant du conseil, chez l'imprimeur avec ordre au lieutenant de police de la faire afficher demain au matin à Paris et publier à son de trompe[108], 6 avril 1672.

Cette déclaration modifia la situation de Le Tellier et de Louvois. Pendant la durée des hostilités, Louis XIV tient à assister aux opérations, tout au moins pendant la belle saison, quelques mois. Louvoie le précède pour tout régler ou l'accompagne en pays étranger. Le Tellier, au contraire, reste auprès de la reine Marie-Thérèse : il reprend alors la direction de l'administration de la guerre, et, à l'occasion, des autres affaires, à lui transmises par son fils ou le roi. Pendant le conflit avec, la Hollande et l'Europe, il existe donc deux ministres, l'un ambulant, l'autre sédentaire, qui ont les mêmes attributions, les mêmes fonctions et sans lesquels Louis XIV, comme il l'avouera lui-même à la fin de 1672, se trouve désemparé[109].

Le 29 avril, le souverain et Louvois partirent de Saint-Germain : le premier voyageant majestueusement, le ministre prendra les devants[110]. Dès le jour de son départ il écrit, de Laon, à son père et le tiendra fréquemment au courant des événements[111]. La reine, ayant été déclarée régente, est assistée d'un conseil composé de Colbert et de Le Tellier[112], qui, pour l'aider dans sa tâche, a les deux premiers commis, Gilbert de Saint-Pouenges et Carpatry, tandis que Louvois, emmené avec Pomponne en Hollande, se fait accompagner de deux autres commis, Vrevin et Dufresnoy.

Les volumes de minutes, d'originaux et de transcrits, qui contiennent les documents intéressant la période d'avril à août 1672, font apparaître, ave une parfaite netteté, l'action administrative de Le Tellier[113]. Ses lettres, écrites fréquemment de Chaville, touchent à toutes sortes de matières, établissement d'une route postale de Metz à l'armée royale, inspection des soldats jeunes, discipline, finances, mouvements de troupes, etc. Le secrétaire d'état répond aux missives et mémoires à lui adressés et, aussi, à ceux envoyés à Louvois. Il s'occupe du chiffre, qui a été changé, fait sceller les ratifications du traité avec la Suède et demander des éclaircissements sur des problèmes douteux afin de les résoudre sans peine et en toute sûreté[114]. Enfin il écrit à son fils.

Louvois a de toutes autres préoccupations. A la suite d'un incident sur ce qui s'est passé à l'égard du carrosse de ma femme, dit-il, il s'adresse au roi qui a trouvé bon que ma femme jouit des avantages qui appartiennent à ma charge. Irrité de la conduite des gens qui ont du crédit auprès de Sa Majesté (Colbert ?) et qui voulaient faire durer cette affaire, il profite de cette dispute sur l'étiquette pour charger Carpatry de lui mander toutes les semaines ce qui s'y (à Paris) pourra passer ou dire, de quelque nature que ce puisse être. Bien plus, il s'adresse à Le Pelletier, alors prévôt des marchands, pour lui confier la même mission, envoyer toutes les semaines un petit mémoire en forme de gazette... sans y rien omettre quoi que ce soit, de quelque nature que ce puisse être : pour avoir toute liberté, le gazetier officieux est assuré du secret, Et, ainsi, afin de réduire au silence ceux qui lui ont cherché noise, je tâcherai, s'écrie Louvois, pour me revancher de leur méchante volonté, que tout aille ici assez bien pour qu'ils en entendent parler[115].

Si cette piqûre d'amour-propre lui a causé une impression vive, et désagréable, elle ne l'a pas détourné un seul instant de son labeur écrasant. Il en instruit Le Tellier dans des lettres, où il se montre atteint, peut-on dire, d'un optimisme à peu près constant. Dès le 4 mai, il mande à son père de ne pas ménager les Espagnols et de prévenir Monterey que, si les Hollandais entreprennent des incursions sur le territoire français, on les poursuivra même sur les terres du roi d'Espagne[116]. Le 11, de Liège, il annonce qu'il va trouver Turenne, l'informer du dessein que vous savez, pour lequel je trouve que toutes choses s'acheminent au-delà de ce que nous pouvions souhaiter[117]. Même enchantement à la fin du mois : si les Hollandais n'ont pas mis de fortes garnisons dans les villes, que l'on va attaquer, le 15 juin, le roi sera en état de songer à les aller visiter de plus près[118]. Et, à cette date, en effet, tout a réussi, capitulation d'Arnheim, retraite des ennemis sur Utrecht, etc. : Je crois que vous aurez été agréablement surpris de tout ce qui s'est passé ici, qui va tous les jours de mieux en mieux[119]. Continuant les progrès, le roi, dans quelques jours, enverra piller La Haye et plusieurs villes et l'on obligera les autres à se mettre sous l'eau, dont ils recevront un dommage qu'ils ne pourront pas réparer de dix ans. Enfin, on attend des plénipotentiaires hollandais, et nous verrons après demain ce que ces messieurs ont à dire[120]. Les pourparlers traînant jusqu'au début de juillet, Louvois ne laisse apparaître aucun découragement, fort loin de là : Je suis bien trompé ou ils viendront signer tout ce qu'on leur a demandé[121].

Jusque-là aux nouvelles politiques et militaires, Louvois a ajouté des indications plus familières. Sa santé est aussi bonne que s'il n'avait bougé de Paris. Il est heureux qu'il en soit de même pour son père, il le remercie des soins qu'il a prodigués à son fils malade : il a bien de la joie que les travaux effectués à Chaville, un réservoir, réussissent et j'apprendrai avec plaisir qu'il se soit empli entièrement[122]. Le ministre, on le sent, en s'abandonnant à ces effusions familiales, cherche à se procurer la détente dont il avait grand besoin. Car la désillusion arrive très rapidement. Les Hollandais ne se soumettent pas, inondent le pays, arrêtent l'avance des armées françaises. Comment cacher les causes de cet insuccès ? Louvois ne trouve rien de mieux à dire que Louis XIV a décidé de ne plus rien entreprendre pour l'instant, d'attendre la saison des glaces pour entrer plus avant en Hollande et s'opposer aux secours que les princes allemands méditent d'apporter aux Provinces-Unies[123] : pure et simple défaite. Dès maintenant, il semble regretter l'échec des pourparlers avec les ennemis. Il demande, en effet, à Luxembourg, qui commande à Utrecht, de continuer ses relations avec un émissaire, qui lui a déjà parlé de la part de M. de Witt : rien dans les propositions de paix n'est contraire à la situation du grand pensionnaire, auquel on pourrait donner le moyen de rétablir ses affaires, si, de son côté, il pousse à la conclusion d'une paix avantageuse au roi de France qu'il se décide à parler clairement, les pourparlers seront secrets et le roi d'Angleterre ne devra pas en être exclu. Bien que Louvois n'emploie que des termes généraux, il n'en est pas moins désireux de renouer la négociation si brutalement interrompue[124]. Ces jalons posés, il repartit pour la France.

 

VII. — Louvois et Turenne en 1672.

Il revenait peu satisfait du résultat final : les Hollandais n'avaient pas été mis à la raison. Sans doute n'osait-on élever la voix, puisqu'on était en présence d'un succès partiel. Les contemporains n'en pensaient pas moins, et ils firent retomber la responsabilité sur le ministre. Avec discrétion, Le Pelletier rapporte : Une jeune politique se trompa assurément, allusion à Louis XIV et à son confident[125]. Pour d'autres, Louvois s'est ingéré trop souvent dans les opérations militaires, prescrivant les manœuvres aux généraux, de concert avec le souverain[126]. Il aurait tenu tête à Turenne et à Condé, qui soutenaient qu'il fallait raser les fortifications des villes hollandaises prises pour ne pas affaiblir l'armée française, le ministre au contraire voulant les conserver et y entretenir des garnisons[127]. Et cette impression, que l'on a, des empiètements excessifs de Louvois, le chansonnier la traduit dans ces vers :

Turenne et Condé, sous le roi,

Généraux de quelque espérance,

Sans l'assistance de Louvois

Pourront bien défendre la France :

Mais, s'ils lui savent obéir,

Que ne pourront-ils envahir[128].

D'après le piémontais Saint-Maurice, dès le début de la campagne, Turenne s'était élevé contre Louvois, qui voulait faire toutes choses, qu'il ne les entendait pas et que cela retarderait les desseins du roi[129]. Bref, le ministre civil est en désaccord avec les grands chefs militaires. Tous les reproches sont-ils fondés ?

Entre Turenne et Louvois, les rapports ont été aimables et corrects jusqu'à la fin de la campagne de 1672. Le secrétaire d'état fait des efforts louables pour que le maréchal ne trouve pas motif à lui chercher querelle : s'il a besoin 'de troupes pour manœuvrer dans la région rhénane, que Chamilly lui en envoie sur sa demande : il sera ponctuellement averti de la suite des affaires avec le Brandebourg, l'Allemagne et Madrid. Il connaîtra les pensées de Sa Majesté, mais Elle n'a rien voulu vous prescrire... Elle vous laisse la liberté tout entière d'exécuter ce que vous jugerez plus à propos. Toutefois, Louis XIV désire être amplement et exactement informé des plans et des actions de Turenne[130]. Celui-ci, de son côté, tâche de réfréner sa rudesse naturelle. Il reproche au ministre de lui écrire avec des cérémonies que je crois que je n'attire pas, de lui adresser trop de compliments, et lui demande de ne pas en faire plus que je n'en fais. Il pense que Sa Majesté n'imputera qu'à respect si je ne l'importune pas de mes lettres : le projet qu'Elle a formé pour les opérations sur le Rhin, il l'a très bien entendu, et l'exécutera de point en point[131].

Cette entente, au moins apparente, ne devait pas durer, quand l'électeur de Brandebourg et les impériaux de Montecuculli menacèrent la ligne du Rhin dans la vue de dégager les Hollandais. Turenne fut chargé de protéger les états de l'évêque de Munster et de l'archevêque de Cologne. Alors se produisirent les dissentiments, le maréchal étant persuadé que les ennemis ne voulaient pas sérieusement attaquer l'Alsace, Louis XIV et Louvois craignant au contraire pour ce pays. Le grave reproche qu'ils adressaient à Turenne était de les laisser dans l'ignorance de ses tractations avec les prélats rhénans et de ses opérations militaires. Il est vrai, répond-il[132], que, quoique je n'eusse pas trop bu, nous avions demeuré longtemps à table et, comme je partais de grand matin pour l'armée, j'omis assez de choses que je devais écrire, croyant que, comme elles seraient exécutées, Sa Majesté verrait que nous en étions convenus. Et, comme il persiste à ne pas donner de ses nouvelles[133], Louvois lui expose le plan formé par le roi : combattre les impériaux, comme vous estimez le pouvoir faire avec avantage, mais se souvenir de quel préjudice serait à Sa Majesté un mauvais succès contre ces armées. Sans doute, le maréchal ne serait pas rendu responsable d'un échec ; cependant il ne doit attaquer qu'à coup sûr[134]. Turenne, s'obstinant avec raison à ne pas quitter l'électorat de Cologne, est prévenu de la formation, en Lorraine, sous le commandement de Condé, d'une armée, à laquelle, en cas d'une marche menaçante des impériaux, il enverra aussitôt de la cavalerie et des dragons : il devra, aussi, tenir un commerce réglé avec Son Altesse[135]. Comme le maréchal n'en faisait rien, il est rappelé à l'ordre par Louvois, qui lui demande pourquoi il n'exécute pas ses instructions, et par Louis XIV, qui lui enjoint de se conformer incessamment et de point en point à sa volonté[136]. Alors Turenne, vivement, riposte que, seuls, ceux qui sont sur les lieux peuvent agir en connaissance de cause : Il est impossible de raisonner sur la marche des armées en ce pays-ci, si on ne le voit... Quoique je n'aie pas trop bonne opinion de moi, je me croirais incapable de servir le roi ; si on ne pouvait asseoir un peu de fondement sur ce que je die. Il y a dix raisonnements à faire suivant la marche que l'ennemi prendra[137]. Si les raisons invoquées par Turenne sont justes elles ne peuvent qu'irriter encore davantage Louis XIV. Aussi lui est-il formellement prescrit de repasser sur la rive gauche du. Rhin, tout en lui laissant encore la liberté d'appréciation et manœuvre[138].

Un événement imprévu et grave termina provisoirement cette correspondance devenue aigre-douce. La lettre du roi était datée de Compiègne et Louvois était parti pour Ath, aussitôt connue la nouvelle que Guillaume d'Orange avait mis le siège devant Charleroi. Il avait dû être fort surpris par offensive hollandaise : car, depuis l'assassinat des frères de Witt (août 1672), il avait cru fermement que les Provinces-Unies désiraient ardemment la paix[139]. Parti le 18 décembre pour concerter toutes mesures avec le maréchal d'Humières, il était de nouveau a Saint-Germain, le 4 janvier 1673[140]. Difficile à cause de l'état des chemins[141], son voyage avait été rendu rapidement inutile : le 22 décembre, Guillaume d'Orange se retirait, deux jours seulement après avoir mis le siège devant Charleroi[142]. Pendant cette courte période, Louvois tint au courant non seulement Louis XIV, qui réclamait avec instance des nouvelles, mais aussi son père[143], auquel il prodigua les informations sur la politique et sur la vie qu'il menait en Flandre[144].

Lors de son départ, il lui avait tout remis, comme d'habitude[145], et Le Tellier s'était ponctuellement acquitté de sa tâche[146]. De Saint-Germain ou de Louvres il correspond avec les agents militaires et diplomatiques et, en même temps, avec son fils. A celui-ci, il explique les mesures à adopter pour protester à Madrid contre le siège de Charleroi par les Hollandais : il annonce le traité avec la Bavière, l'offre de médiation de princes de l'Empire pour terminer le différend avec l'Allemagne, les instructions données par lui pour faire avancer les escadrons de cavalerie vers le nord, etc.[147]

Louis XIV ayant résolu de s'avancer jusqu'à Compiègne, il dut le suivre avec les commis Saint-Pouenges et Carpatry. A Louvres, dans la matinée du 22 décembre, il fut frappé d'une attaque d'apoplexie et revint à Paris, laissant à Louis XIV ses commis avec les papiers et les chiffres, afin que rien ne fût retardé[148]. Louis XIV, sincèrement touché par cet accident, mande à Louvois aussitôt : J'en suis doublement fâché : car, ayant l'amitié que j'ai pour vous deux, je crains la suite de son mal. Quelques jours après, ayant reçu une lettre de Le Tellier, qui a l'esprit libre, quoiqu'il se croie mal, il ajoute : Cela me fait bien espérer de sa santé et je vous assure que je la souhaite autant que vous, sachant la perte que je ferais de toute manière[149]. Il adresse au malade la relation de la levée du siège de Charleroi, afin qu'il la rendit publique dans Paris ; il ordonne à Pomponne de faire des extraits de tout ce qu'il reçoit et de les envoyer au fils et au père[150].

La crise, subie par Le Tellier, fut-elle grave ? Selon Saint-Maurice, le ministre n'est pas sans danger, il est paralytique du côté gauche, fort travaillé des hémorroïdes au 10 février 1673, il se porte un peu mieux, mais il n'y a pas apparence qu'il ait grande part aux affaires ni qu'il puisse agir[151]. Selon Le Pelletier, au contraire, cet accident n'eut pas de suites[152]. Il est certain que, sur la demande du roi, Le Tellier lui donne son opinion, dès le 25 décembre, sur la conduite à tenir envers la cour de Madrid[153]. Il est certain aussi que tous les courriers descendent chez lui, à Paris, où l'on apprend la levée du siège de Charleroi[154]. Enfin, il est certain que les intendants continuent à lui envoyer des rapports[155]. Renseigné par le secrétaire Junquières sur l'état de son père[156], Louvois constatera en février qu'il se porte beaucoup mieux et sera bientôt en état de se trouver au conseil : en mars, que, dans très peu de jours, il se tiendra à Chaville, pour, de là avoir l'honneur d'assister dans les conseils du roi. Et vous jugerez facilement que, l'honorant et aimant autant que je fais, j'aurais une très grande joie de le voir agir à son ordinaire[157]. Aucun doute ne subsiste la crise a été dure et longue : elle n'empêchera pas Le Tellier de se rétablir entièrement et de participer, toujours, aux affaires publiques[158].

 

VIII. — Le Tellier et Louvois en 1673.

Au début de 1673, Louvois a une situation très forte auprès de Louis XIV : son père, malade, lui lascia l'esercizio assoluto des fonctions de secrétaire d'état de la guerre, le cose attinente alla querra terrestra, munizioni, apprestamenti, fortificazioni fuori del regno ed altre cose corrispondenti : en outre, il reçoit nel grandi affari il consiglio della prudenza paterna. S'il lui arrive de rester au travail un jour et demi sans repos, il dort ensuite trente heures de suite sans se réveiller. Il est d'un tempérament très vigoureux, il a une stature carrée et un esprit très lucide : mais on désirerait chez lui un peu plus d'urbanité et de politesse. A ce portrait du Louvois de 32 ans, tracé par un diplomate vénitien, Primi Visconti ajoute ce trait : Louvois est d'un caractère dur et violent, le regard sévère. On dirait qu'il maltraite les gens quand il parle, de sorte que beaucoup n'osent l'affronter[159]. L'appui, sans réserve, que lui accorde le roi, a accentué ces tendances nouvelles. Ne vont-elles pas lui attirer des désagréments, des ennuis, être même des obstacles à son ascension, maintenant que la guerre allait reprendre ?

En attendant, d'accord avec Le Tellier, il avait conseillé à Louis XIV de ne rien précipiter pour éviter l'entrée de l'Espagne en guerre, après les impériaux[160]. Sa Majesté, en effet, après avoir bien examiné l'état des choses, a jugé à propos de ne rien entreprendre d'ici au printemps prochain, ni en Franche-Comté, ni en aucun autre lieu contre les Espagnols[161]. Pour l'instant, le ministre n'a donc qu'à correspondre aimablement avec Condé, à le féliciter de son inspection en Alsace[162]. Avec Turenne, la conversation s'améliore quelque peu : le maréchal reste toujours secret et distant[163], mais bat sur le Wéser l'électeur de Brandebourg, qui va se hâter de signer son accommodement avec la France. Du coup, Louvois ne lui ménage pas les félicitations, tout en lui rappelant que, si on vient l'entretenir de suspension ou de paix, c'est au roi qu'il faut parler pour pareilles choses, vos pouvoirs ne s'étendant qu'à bien faire la guerre[164].

S'il ne ménage pas les Allemands récemment battus et parle du peu de cas qu'il faut faire d'eux pour autre chose que pour faire la débauche[165], Louvois ne se montre pas plus indulgent envers les Hollandais : S'ils étaient des hommes, il y a longtemps qu'ils auraient fait la paix. Mais... ce sont des bêtes, qui se laissent conduire par des gens qui ne songent qu'à leurs intérêts : toutefois, nonobstant le mépris que l'on doit avoir de cette nation, il faut regarder comme ambassadeurs les délégués qu'elle enverra aux conférences de Cologne[166]. Ancré dans cette opinion par Luxembourg, qui est à Utrecht[167], il déclare le roi résolu à donner la paix aux Hollandais, s'ils la demandent aux conditions que Sa Majesté peut désirer[168]. Comme les Hollandais ne se montrent pas disposés à céder, il faut bien reprendre la guerre avec l'armée de Turenne sur le Wéser (30.000 hommes), celle de Condé en Hollande (30.000 hommes) et celle du roi réunie à Tournai (32.600 hommes)[169].

Le 20 avril fut dévolue à Le Tellier la délégation de la signature royale, pendant que Louis XIV serait parmi les troupes[170]. Le 1er mai, le roi et Louvois partirent, suivis à quelques jours de distance par Pomponne. Louvois devait être absent pendant plus de cinq mois, assister à la prise de Maëstricht, visiter la Lorraine et l'Alsace et rentrer à Paris le 11 octobre[171]. Pendant ce temps, Le Tellier expédie les affaires qui se présentent[172]. Le gouverneur du Dauphiné Lesdiguières les intendants Bezons et Carlier entretiennent correspondance avec lui[173]. Carpatry lui porte tous les documents qu'il reçoit, lui montre les dépêches pour l'Italie et le Brandebourg. rédige des mémoires sous sa dictée[174]. Le secrétaire d'état écrit à Louis XIV, à Vaubrun pour l'établissement d'un bureau postal à Maëstricht, s'entremet auprès de Colbert pour le paiement d'un subside à l'évêque de Munster, demande à l'intendant Robert un rapport sur la malheureuse affaire de Naerden[175], etc. Sans doute, ainsi que l'année précédente, cette correspondance officielle n'est pas bien fournie les soldats et les officiers étant en pays étrangers, l'administration militaire de France vit au ralenti.

En outre, le père et le fils échangent fréquemment des lettres, et le travail de Le Tellier est ainsi accru[176]. Il est aisé de comprendre que les problèmes de guerre et de diplomatie tiennent dans ce commerce épistolaire la plus grande place. Ainsi Louvois renseigne fort amplement sur le siège de Maëstricht, qui capitule le 30 juin[177]. Il transmet à son père les instructions adressées à Turenne et à Condé en le priant de les tenir secrètes provisoirement : il lui signale la marche des impériaux et, un peu plus tard, les manœuvres du maréchal[178]. Il le supplie de lui dire si la nouvelle de l'entrée en guerre de l'Espagne est un simple bruit ou un avis fondé[179]. Surtout il l'entretient des négociations de Cologne, propositions insuffisantes des Hollandais, conditions plus modérées de la France et de l'Angleterre et devant rester secrètes, s'arranger pour qu'en cas de rupture Louis XIV n'en soit pas responsable, connaissant bien de quelle importance il est d'en laisser tomber le blâme sur Tes ennemis[180]. Pour l'administration intérieure, Louvois charge Le Tellier de délivrer à Marillac la commission d'intendant du Poitou, de faire faire des prières pour la prospérité des armes de Sa Majesté, d'expédier des nominations pour trois ans et non à vie de lieutenants de roi et de mayeurs, de retarder la révocation de plusieurs commissaires des guerres dans le Roussillon[181]. Informé que le gouverneur de Belle-Isle a emprisonné un sergent dénonciateur d'un passe-volant, et adoptant l'opinion de son père que cet acte inexcusable porte atteinte à l'autorité des commissaires, il blâme sévèrement cet officier qui doit libérer sur-le-champ le prisonnier[182]. Et toutes ces lettres sont parsemées de récits pittoresques — destruction du carrosse de Louvois par un cocher de religieuses qui menait fort mal, des nouvelles de sa santé, et surtout des effusions de reconnaissance et de gratitude à l'égard de son père, pour les soins qu'il vous pie de prendre de mes affaires... de tout ce qu'il vous plaît de faire pour mes enfants[183].

 

IX. — La coalition Turenne-Condé et la crise de janvier 1674.

Cette gaieté, ces sentiments élevés risqueraient de faire illusion sur l'état d'esprit de Louvois en octobre 1673. Il revenait en France fortement déçu. La campagne n'avait pas amené de résultats décisifs : outre la Hollande, on avait eu à combattre l'Empire, l'Espagne et le duc de Lorraine : si on avait emporté Trêves, on avait perdu Bonn,

Cependant Louvois avait longtemps conservé ses illusions. Il avait cru que les Hollandais seraient obligés à faire la paix aux conditions que le roi leur voudra imposer[184]. Moins affirmatif était-il avec Le Tellier : Il y a apparence que la paix est pour se conclure, pourvu que les Hollandais y aillent de bonne f°[185]. Moins encore quelques jours après : Si les ambassadeurs hollandais sont revenus (à Cologne) avec des instructions peu favorables, il faudra se résoudre à continuer la guerre[186]. A Le Pelletier il ne cache pas sa désillusion : Quand une fois la guerre est commencée, on ne la finit pas quand on veut, à moins que l'on ne veuille sacrifier toute la gloire que le roi peut avoir acquise... Il faut se résoudre à une longue guerre[187].

Un ami de sa famille, Courtin, qui représente la France au congrès de Cologne, vint encore assombrir le ministre par sa franchise et son pessimisme. Tout en protestant de son attachement et de son respect, dont Louvois ne peut douter, il lui déclare n'attendre rien de bon de la négociation, dont il est chargé. Le roi, étant le plus grand prince du monde et le plus heureux, devrait conclure une paix, qui serait très honorable pour lui et très avantageuse à son état. La guerre, sans doute, lui donnera une nouvelle gloire, mais causera la ruine de ses sujets. Puis, haussant le ton, Ne sait-on pas que l'état est épuisé d'argent, que la plus grande partie de cet argent est sortie du royaume et n'y rentrera point dans le temps que la guerre fera cesser le commerce ? Ne jugera-t-on point que les levées, que le roi voudra faire sur ses peuples, qui seront extrêmement appauvris (et qui le sont déjà), pourront réussir sans exercer quelques violences ?... L'autorité, que le roi a exercée si souverainement jusqu'à cette heure, étant attaquée au dehors, s'affaiblira au dedans... Sa Majesté est trop sage et vous, M., trop éclairé pour ne pas comprendre que la balance n'est pas égale et que, dans la continuation de la guerre, il y a incomparablement plus à perdre qu'à gagner[188]. Ce franc parler, cette exagération même, aboutissant à un véritable réquisitoire, durent exercer une forte impression sur le ministre : Vous me faites un hideux portrait de la continuation de la guerre, dit-il, laquelle je crois qu'il ne faut pas regarder comme un avantage, mais comme un mal nécessaire et qu'il n'est pas possible d'éviter à moins que de se résoudre à faire une paix comme celle de 1668[189]. Une guerre glorieuse et très profitable, Louvois n'a pas changé. Néanmoins, il est bien forcé de tenir compte de la situation nouvelle : lui qui avait résisté aux conceptions des généraux se décide, le 22 octobre, à abandonner tout le plus tôt qu'il se pourra toutes les places conquises l'année dernière sur les Hollandais, non sans mauvais gré, puisqu'il en exclut sept[190].

Il était indispensable de citer les documents eux-mêmes pour prouver que la situation générale, à la fin de 1673, causait de sérieuses préoccupations au ministre. D'autre part, il ne pouvait pas être entièrement rassuré sur sa situation particulière : car il avait mécontenté les généraux, et grandement. Si l'on se fiait aux nombreuses protestations d'amitié et de dévouement, prodiguées à Louvois par Condé[191], qui commande d'abord à Utrecht, puis en Flandre, on pourrait croire que Monseigneur le prince n'éprouve aucun mécontentement. Dans la réalité, sous une forme généralement correcte, parfois sèche, il se plaint à lui de ne pouvoir entreprendre rien de considérable avec la méchante cavalerie et le peu d'infanterie que j'ai. Récidivant, il craint de finir cette campagne dans l'inaction : Vous voyez que cela n'est pas fort agréable[192]. Il décrit l'état de son armée : cavalerie belle et bonne, mais la majeure partie de l'infanterie fait pitié, il n'y a dans les bataillons ni colonel, ni lieutenant-colonel, ni major, ils ne se connaissent quasi pas les uns les autres, enfin c'est une très méchante milice. A cette critique sévère et vigoureuse, Condé ajoute qu'on ne peut former des projets avant de connaître ceux de l'ennemi et l'état où seront les troupes du roi après la marche. Pour rompre le dessein des adversaires, il faut constituer un corps d'infanterie capable d'attaquer leurs places et, quelque cavalerie que j'aie, je ne puis vivre chez eux sans de l'infanterie et il est inutile de m'envoyer de la cavalerie, si on ne m'envoie de l'infanterie[193]. Rien de plus net : Condé est irrité contre le ministre, qui l'a réduit à une déplorable inaction, et son fils traduit bien les sentiments dont il est animé : Il s'en faut beaucoup que les choses aient tourne agréablement pour M. mon père pendant cette campagne[194]. Au début d'octobre, Condé demande son rappel.

Peut-être se serait-il contenté de récriminer sans agir. Mais il restait Turenne qui, en décembre 1673, revint ulcéré. Jusqu'en septembre, les rapports entre Louvois et lui étaient restés corrects. Le premier avait reproché au second, en termes modérés, mais fort justement, l'indiscipline de ses troupes. Il s'était astreint à parler au nom du roi, et, quand il ne le faisait pas, il énonçait ses idées personnelles avec une extrême précaution, laissant Turenne libre de changer ce que vous estimerez à propos, pourvu que vous exécutiez en gros ce qui est en cela des intentions de Sa Majesté[195]. Si le maréchal juge trop faibles les effectifs de son armée, on lui enverra des renforts[196]. On intervient aussi dans les plans militaires, avec discrétion d'abord. A Turenne opposé aux impériaux, qui se rassemblent en Bohême et projettent de marcher vers le Rhin en traversant la Bavière, il est suggéré d'occuper le pont d'Aschaffenbourg pour leur barrer le chemin[197]. Turenne ayant proposé, au contraire, d'attaquer les ennemis et de les refouler en Bohême, Louvois, au nom du roi, discute longuement ce plan et le rejette : A tout autre qu'à vous, Sa Majesté enverrait ordre positif d'exécuter, mais en la confiance qu'Elle prend en vous... Elle vous laisse une entière liberté de faire ce que vous jugerez plus à propos[198].

A toutes les missives du ministre impatient, Turenne n'avait cessé de répondre qu'avant de manœuvrer, il lui fallait se rendre compte du dessein des ennemis[199]. Mais, quand il veut agir et que les stratèges en chambre Louis XIV et Louvois l'en empêchent, en atténuant seulement leur refus sous une forme polie, il ne peut se contenir. Il fera tous ses efforts pour se conformer aux intentions du roi ; mais, dit-il au ministre, Vous me permettrez de vous dire que je ne crois pas qu'il fût du service de Sa Majesté de donner ides ordres précis de si loin au plus incapable homme de France[200]. Tout en lui laissant encore la liberté stratégique[201], Louvois, de son côté, a pris un ton acerbe et impérieux. Sans se lasser, il réclame des nouvelles : Turenne n'a qu'à écrire amplement à Sa Majesté ce que vous croirez pouvoir faire, ou, quand vous estimerez qu'il ne sera pas de son service de faire quelque chose, l'informer exactement des raisons qui vous en ont empêché[202]. Il n'hésite pas devant les récriminations violentes, quand le maréchal, reculant le long du Rhin, a franchi le fleuve pour aller sur les bords de la Moselle : Les affaires en Allemagne ne sont pas en état aussi avantageux que Sa Majesté pourrait le souhaiter : être allé si avant et revenir ensuite si en arrière, quel désastre pour la réputation du roi ! Pourquoi Turenne marché si lentement depuis Philipsbourg jusqu'à Kreuznach ? Sa Majesté est très persuadée qu'il n'a pas été possible de mieux faire et que vous avez pris en tout le bon parti. Cette atténuation purement formelle n'enlève rien à l'acuité et à l'aigreur des reproches[203]. Turenne ne s'indigne pas, semble résigné : Dans les affaires difficiles, dit-il, si on croyait pouvoir remédier à tout ce qui déplaît, on ferait de grandes fautes et je crois qu'il faut bien voir l'état présent et ensuite faire ce qui est praticable[204].

Lorsqu'après la prise de Bonn par les impériaux (12 novembre) l'armée fut mise en quartier d'hiver, Louvois écrit au maréchal : Sa Majesté trouve bon que vous vous en reveniez ensuite auprès de sa personne. Personne n'aura plus de joie que moi de vous revoir en bonne santé[205]. A ce compliment, Turenne répondit simplement : Je m'en irai comme vous me mandez que le roi me l'ordonne[206].

Le 19 décembre, au moment ou le maréchal arrive à Paris, Louvois écrit à Courtin : Personne ne doute de l'avantage qu'il y aurait de pouvoir présentement tomber sur les impériaux. Mais ceux qui commandent des armées disent que vingt lieues de marche en cette saison détruiraient plus une armée que la perte d'une bataille. Sur quoi, personne n'étant en état de répliquer, il faut remettre la partie au printemps prochain[207]. Le 25 décembre, Mme de Sévigné apprend à sa fille que La Mer (Louvois) est mieux que jamais ; quelques jours après, que M. de Turenne est mal avec M. de Louvois : mais, comme il est bien avec le roi et M. Colbert, cela ne fait aucun éclat[208]. En réalité, le conflit entre le civil et les militaires avait déjà commencé. La chronologie en est incertaine, les détails excessivement nombreux[209]. Le récit en ayant été fait par plusieurs historiens[210], il me suffira de le résumer et de le compléter.

Turenne et Condé s'unirent pour protester auprès de Louis XIV contre l'intervention de Louvois dans les questions de stratégie, son refus d'augmenter les effectifs, ce qui avait causé la perte de Bonn, et lui dénièrent toute compétence en ces matières. Les contemporains veulent que, si cette coalition était restée unie, le ministre se serait trouvé en très mauvaise posture, risquait une complète disgrâce. Que ce conflit ait produit beaucoup de bruit à la cour, nul n'en doutera. Que Louis XIV ait voulu sacrifier un homme dont le labeur et le zèle lui étaient connus et dont les conseils, d'après son aveu, lui étaient indispensables, il est difficile de l'admettre.

Le Tellier intervint néanmoins pour atténuer le choc et l'éclat, et les mémorialistes du temps attribuent, dans un touchant accord, à son habileté et à sa souplesse la dislocation de la coalition. Ce que l'on peut deviner de ses démarches est minime, mais important. Condé lui devant, en grande partie, d'avoir perdu lie caractère de rebelle résigné et d'avoir été remis au grand jour dans le monde militaire, Le Tellier s'adressa à l'aumônier du prince, Roquette, évêque d'Autun, avec lequel il était en relations depuis de longues années : d'après le nonce Bargellini, en 1668, ce prélat gouvernait l'esprit de Le Tellier et était le directeur de toute la maison[211]. Condé, auquel Le Tellier lui-même rendit visite, se laissa convaincre[212].

Le secrétaire d'état, selon l'ambassadeur vénitien, alla ensuite trouver Turenne. La lettre du maréchal à Louis XIV marque la dernière phase de l'incident. Bien qu'elle ait été publiée déjà[213], il est nécessaire de la reproduire, parce qu'elle rend tout commentaire superflu : Turenne au roi, janvier 1674. Sire, afin de faire connaître à Votre Majesté que ce n'est pas à Paris, où je vas aujourd'hui faire mes dévotions et où je demeurerai peu, que l'on m'a donné des impressions, je lui dirai que M. le marquis de Louvois me vint voir hier, que j'irai chez lui dès que je serai de retour et que j'en userai fort civilement avec lui. Il m'a avoué que l'on a eu beaucoup de temps pour sauver Bonn avec 4 ou 5.000 hommes, et par là toutes les affaires. Nous sommes entrés dans de grands détails, avec beaucoup d'honnêteté et de dissimulation de son côté. Je savais parfaitement, il y a deux jours, comme s'était passé l'accommodement de M. le prince et comme M. de Louvois y est entré, et les raisons que l'on lui a dites pour cela. J'ai été bien confirmé de la chose dans le temps que j'eus l'honneur d'être hier au soir avec Votre Majesté, et par le gros de l'affaire, qui la marquait clairement avec beaucoup de circonstances, et parce que je sais bien que M. de Louvois, parlant du peu d'inconvénient de rompre avec M. l'électeur palatin, disait que l'on lèverait beaucoup de contributions dans son pays. M. le prince dit que l'on pourrait savoir .des vaches pour la subsistance de l'infanterie : il connaît parfaitement la situation de Philipsbourg : c'est assez dire. Comme j'aurai l'honneur de pouvoir parler à Votre Majesté ici et de lui écrire quand Elle sera éloignée, je lui dirai ou lui ferai savoir les pas que M. de Louvois continuera à faire pour entrer dans les sentiments de son père, lequel n'a jamais pardonné[214]. Et, cela joint avec la hauteur et l'ambition du fils, Votre Majesté peut bien juger du danger où est un homme éloigné et quel est le précipice qu'il voit à chaque pas devant soi, puisqu'étant près, il a remarqué quantité de petits endroits, qui ne l'assurent que trop de cette vérité-là.

Ainsi, grâce aux démarches de son père et à la juste corn-préhension de Louis XIV, Louvois est sorti d'affaire. Mais il a supporté une humiliation que son caractère hautain a dû ressentir vivement. D'ailleurs, tout le monde croit que Turenne a remporté un succès éclatant, ayant obtenu du roi la liberté de lui écrire directement. Quand reprendront les hostilités, Bussy notera, avec une exagération évidente : Il est parti d'ici avec pouvoir de tout faire de son chef et même de n'avoir aucun égard aux choses qu'on pourrait lui mander, s'il le jugeait à propos[215]. En outre, non seulement en France, mais à l'étranger, s'est répandue la nouvelle de la chute du ministre. A Courtin, qui lui a fait part de ces bruits sans y croire[216], Louvois répond qu'ils marquent seulement l'inquiétude des courtisans qui, après m'avoir mis, un an durant, au-dessus de tout le monde, m'ont fait la grâce de me disgracier sans que je n'aie bougé de ma place[217]. Enfin, pour comble d'infortune, les impitoyables chansonniers s'en sont mêlés, et peut-être Louvois a-t-il été le plus désagréablement touché et froissé par leurs épigrammes, s'il les a connues[218].

Il a subi, en réalité, un préjudice matériel peu important, mais un préjudice moral sensible. Il doit prendre sa revanche. Turenne pourra écrire au roi tant qu'il le voudra : il n'aura pas de nombreuses troupes. Condé, qui n'a pas insisté et continue à correspondre avec le ministre, disposera d'une belle armée avec laquelle il remportera la victoire de Senef. Ce brillant fait d'armes, quoique coûteux, confirme la réputation militaire de M. le prince et relève, devant l'opinion, celle du ministre.

 

 

 



[1] A. E., Mém. Doc., France : dans chacun des volumes 922, 927, 929, 933, 935, 937-941, 943-944, on trouve un mémoire des expéditions par M. Le Tellier, secrétaire d'état : ce sont des listes des expéditions avec analyses sommaires des matières, de 1667 à 1677. Dans le volume 933, sont les expéditions signées par Louvois, chargé de l'intérim des affaires étrangères : dans le volume 935, c'est Le Tellier qui remplit le même office : septembre 1671-janvier 1672. — V. aussi B. N., Collect. Cangé, t. 30-32, tables des expéditions signées par Le Tellier.

Je signale, en outre, qu'aux A. N., Guerre A1, 245 orig., 468-469 orig., les lettres sont adressées à Le Tellier jusqu'en 1668 et à Louvois ensuite : on ne peut pourtant pas tirer de ce fait une conclusion précise et ferme. Il suffit de noter que certaines dépêches sont envoyées à Monseigneur le marquis de Louvois, conseiller et ministre d'état : Louvois sera ministre d'état en février 1672 seulement, et non en 1668.

[2] Terlinden, Le pape Cément IX..., 101, 110, 148-149.

[3] A. N., Guerre A1, 231-235 min., — 238-239 tr., — 251 orig., pièces 88-89.

[4] Id., 231 min., février f° 182 et 222, — 238 tr., f° 2 v°, — 239 tr., f° 64 et 67 v°. Louvois à De La Croix, 17 février 1669.

[5] Les pouvoirs, commissions et instructions sont dans A. N., Guerre A1, 232 min., avril f° 1, 14, 22, 96, 134 et 160, — 238 tr., f° 6 à 21, 33 à 41, — 251 orig., pièces 88-89. Navailles, Mém., 217-218, fut enchanté d'être choisi : Je reçue cet ordre avec beaucoup de joie.

[6] A. N., Guerre A1, 231 min., février f° 314-5, — 238 tr., f° 3.4, Louvois et Noisy et à Monplaisir, 28 février 1669.

[7] Id., 233 min., mai f° 142, — 238 tr., f° 50 v°, Louvois à Navailles, 17 mai 1669.

[8] Id., 238 tr., f° 71, Navailles à Le Tellier, 2 juin 1669.

[9] Id., 234 min., août f° 165 v°, — 238 tr., f° 63, Louvois à Navailles, 20 août 1669.

[10] Id., 235 min., septembre f° 132, — 238 tr., f° 69 v°, Louvois à Le Tellier, 16 septembre 1669. — Id., 235 min., septembre f° 135, — 238 tr., f° 71, idem à Colbert.

[11] Id., 235 min., septembre f° 148 et 150, — 238 tr., f° 78-79, Louvois à Le Tellier et à Colbert, 20 septembre 1669.

[12] Id., 238 tr., f° 131, let. du 10 octobre 1669 : il s'agissait de plus de 400.000 livres.

[13] Id., 238 tr., f° 118, Le Bret à Louvois, 30 septembre 1669 : — Id., 235 min., octobre f° 179, Louvois à Le Tellier, 15 octobre 1669.

[14] Note du président Rose dans Louis XIV, Œuv., V, 451, note 3. Toussaint Rose, président à la chambre des comptes, un des secrétaires du cabinet, tenait la plume pour Louis XIV, dont il imitait parfaitement l'écriture et la signature.

[15] A. N., Guerre A1, 208, 213, 231-232, 245, 247-249, 251, 255-256, min. : 249, 222, 228, 237, 240, 250, 252-253, tr. : textes de 1667 à 1671.

[16] A. N., Guerre A1, 245 min., pièces 242 et 145, Aubeville au roi et à Le Tellier, 27 novembre 1667.

[17] Id., 213 min., f° 175 et 221, — 222 tr., n' 474 et 489, Louvois à Le Tellier, 18 avril 1668, et Le Tellier à Louvois, 21 avril.

[18] Id., 237 tr., f° 5, copie du mémoire, 4 janvier 1669.

[19] Id. : 231 min., janvier f° 36, — 237 tr., f° 14, Louvois à Aubeville, 4 janvier 1669 : — Id., 237 tr., f° 1, instruction du 7 janvier.

[20] Id., 237 tr., f° 86 v°, — 240 tr., n° 21, — 251 min., pièce 83, let. du 12 janvier 1669.

[21] Id., 237 tr., f° 89-90, Aubeville à Louvois, 13 janvier 1669.

[22] Id., 231 min., janvier f° 203 v°, — 237 tr., f° 44, Louvois à Créqui, 23 janvier 1669.

[23] Id., 237 tr., f° 141 et 181, Créqui au roi et à Louvois, 24 et 29 janvier 1669.

[24] Id., 237 tr., nombreuses let. de d'Aubeville, p. ex, f° 287, 320-321, 375.

[25] Id., 232 min., avril f° 287, — 237 tr., f° 70, Louvois à Aubeville, 22 avril 1669.

[26] Id., 247 min., août f° 13, Louvois à Chamilly, 26 août 1670 : — Id., 248 min., f° 5 et 8, — 252 tr., f° 1, Louvois à Créqui, 5 septembre 1670.

[27] Id., 247 min., août f° 9, let. de Carpatry (?), 22 août 1670.

[28] Sur cette courte et facile campagne, V. A. N., Guerre A1, 248, 250 et 251.

[29] A. N., Guerre A1, 250 tr., f° 51-52, Créqui au roi, 18 septembre 1670.

[30] Id., 282 min., septembre f° 54, — 252 tr., f° 14 v°, à Créqui.

[31] Le futur Charles V.

[32] A. N., Guerre A1, 248 min., septembre f° 279.

[33] Id., 252 tr., Louvois à Créqui, 19 novembre 1679.

[34] Id., 249 min., décembre f° 1, 18, Louvois à Créqui, 1er décembre 1670.

[35] Id., 249 min., novembre f° 46 et 48, — 252 tr., f° 129, Le Tellier à Créqui, 10 novembre 1670. Le même jour il écrit à l'intendant Choisy relativement à la souveraineté du roi sur une seigneurerie : Id., 249 min., novembre f° 49-50, — 252 tr., f° 132.

[36] A. N., Guerre A1, 255 min., avril f° 18, — 252 tr., f° 232, Louvois au roi, 7 avril 1671. Il envoie des nouvelles à son père les 7 et 9 avril : Il n'y a rien en ce pays-ci (Hierges, canton de Givet) qui mérite que je voue en informe. C'est pourquoi, après vous avoir assuré que ma santé est autant bonne que je le puis souhaiter, je finirai en vous assurant de mes obéissances et de mes respecte très humbles : A. N., Guerre A1, 255 min., avril f° 21-24.

[37] Quelques tentatives pour renouer les pourparlers n'ont pas de consistance et sont infructueuses ; v., p. ex., A. N., Guerre A1, 256 min., août f° 50 et 53, — 252 tr., f° 246 v°, — 272, f° 623, Louvois à Créqui, 7 août 1671 et à Luxembourg, 7 mars 1672.

[38] A. N., Guerre A1, 256 min., août 1671.

[39] Id., 258 min., janvier-décembre 1671.

[40] L. André, Michel Le Tellier..., 112, note 1.

[41] Les indications sur ce voyage sont fournies par Louvois : A. N., Guerre A1, 217 min., f° 36, 229, 236-237, 251, 258, 263, 282, 286, 291 et 313. — 223 tr., 355, 357 et 360-361, — 228 tr., n° 65.

[42] Les indications sont dans Id., 231 min., février f° 238, — 232 min., mars f° 181 et 184, — 233 min., mai f° 46, 67, 107, 110-111, 127, 134, 149 et juin f° 6, — 239 tr., f° 71, 110, 119, 181-182, 189 à 191. Les lettres à Le Tellier sont dans Id., 241 tr., f° 341 346, 350 et 353.

[43] Let. des 19, 21, 24 et 25 mai 1669.

[44] Rotschild, Les continuateurs..., III, col. 626-7 : le gazetier-poète Robinet rend compte d'une visite du roi à la Bastille pour voir l'arsenal reconstitué par Louvois.

[45] A. N., Guerre A1, 238 tr., f° 51, 53-6, cinq lettres à Navailles, Infreville, etc. : — Cf. Id., 233 min., mai f° 149, 153, Le Tellier à Choisy et à Damorezan, mai 1669.

[46] Les indications sont dans A. N., Guerre A1, 234 min., août f° 110, 152 v°, 193 et 251, — 235 min., septembre f° 261 et octobre f° 44, 73, 75, 88, 186, 191 v° et 193, — 236 min., novembre f° 4, — 239 tr., f° 321, 327, 340, 354, 397 v°, 401 et 405.

[47] A. N., Guerre A1, 220 min., f° 95, Louvois à Chamois, 5 novembre 1668. L'un et l'autre d'ailleurs, pour leur commodité, prenaient des appartements supplémentaires : p. ex., en octobre 1667, le roi habitant les Tuileries, ils se logent tout contre Saint-Roch : Saint Maurice, I, 149. Le Tellier achète une maison à Fontainebleau, Louvois à Saint-Germain : A. N., Guerre A1, 235 min., septembre-octobre 1669.

[48] A. N., Minutier central, LXXV : — Mémoires ou Essai, 33, 35 : —, Dumolin, Etudes de topographie..., II, passim, en particulier 283-285. L'architecte Charles Chamois sera chargé de remanier cet hôtel, comme il remanie Chaville pour Le Tellier.

[49] Les indications sont dans A. N., Guerre A1, 246 min., janvier f° 57-58 et mars ; f° 171 v°, — 247 min., avril f° 50, 56, 59, 84, 122-3, 143 et 177.

[50] Les étapes sont Saint-Quentin (1er mai), Landrecies (5), Le Quesnoy (7), Cateau-Cambrésis (9), Bapaume (12), Arras (13), Tournai (17), Courtrai (20), Lille (25), Saint-Venant (28), Bergues (29), Dunkerque (30). Après son retour, la première lettre de Louvois est datée de Saint-Germain, 11 juin.

[51] Recueil des Instr., Hollande, I, 269.

[52] Mém., 430.

[53] Choisy, Mém., dans Petitot, II, 63, p. 404, affirme que la duchesse d'Orléans avait été froissée de l'air de dureté et de décision de Louvois : elle et Louis XIV auraient décidé de ne rien lui dire : mais la vérité est que le roi fit confidence de tout à M. de Louvois vraisemblable, mais incontrôlable.

[54] Les indications sont dans A. N., Guerre A1, 247 min., juillet f° 38, 112, 114, 125 v°, 140, 143, 164, 176 et août f° 2 et 3.

[55] Guy Patin, III, 760, annonce le départ dans sa lettre du 6 août.

[56] Du 27 août au 4 septembre, Louvois accompagne les troupes jusqu'à Reims : v. ci-dessus les affaires de Lorraine.

[57] Les indications sont dans A. N., Guerre A1, 248 min., octobre f° 159, 162, 165, 227 à 230, 256, 239, 243, 245, — 299 min., novembre f° 1 v°, 6, 7, 13, 16, 67 et 69, — 252 tr., f° 121 v° et 133 : Cf. Guy Patin, III, 770, avec une erreur de date.

[58] A. N., Guerre A1, 252 tr., f° 129, 131-132.

[59] Les indications sont dans A. N., Guerre A1, 254 min., février f° 79 et 166, — 255 min., mars f° 61, 72-73, 176, 188, 190, — avril f° 4, 25, 30-35, 38-43 et juillet 18, — 258 min., f° 85, 89 à 133, — 252 tr., f° 223 v°, 229 v° et 237.

[60] A. N., Guerre A1, 255 min. Les étapes sont Donchéry (7 avril), Hierges (9), Philippeville (10), Marchevile sous Charleroi (12), Lille et Tourde (17), Lille (19), Steenstraete (21). Dunkerque (24 avril-26 mai), Lille (27), Tournai (28 mai-12 juin), Dunkerque (13), Tournai (15), Ath (19 juin-5 juillet), Saint-Germain (20).

[61] Les Lettres et les mémoires chiffrés de Le Tellier manquent.

[62] A. N., Guerre A1, 285 min., avril f° 35.

[63] Id. f° 44.

[64] Id., mai f° 4.

[65] Recueil des Instr., Hollande, I, 269-270. — Le titre de certains volumes des A. N., Guerre A1, 259 à 262 orig., est très curieux : 1671, Guerre de Hollande, 9 premiers mois ou trois derniers mois. Ceux des volumes 263, 265 et 272 sont plus exacts, puisqu'ils se rapportent aux préparatifs de la guerre de Hollande en 1671.

[66] A. N., Guerre A1, 258 min., f° 89 à 133, — Id., 255 min., juillet f° 18, let. de Louvois à Chamilly.

[67] Mém., II, 41. — Saint-Maurice, II, 156, exagère en disant le 11 septembre 1671 : Quant à M. de Louvois, il régente maintenant à Versailles où il est seul... et M. Le Tellier se tient à Chaville, qui est sa maison de campagne, exprès pour laisser les coudées franches à son fils.

[68] Louis XIV, Œuv., V, 435, à Colbert, septembre 1671 : Il me reste à faire savoir que j'ai déclaré Pomponne secrétaire d'état. Je ne désire plus que Berny (fils de Lionne) en fasse la fonction. Dites-lui que je lui ordonne d'envoyer ses chiffres à Louvois, à qui j'ai recommandé d'en faire la charge jusqu'à l'arrivée de Pomponne.

[69] B. N., f. fr., 14189, Mémoires ou Essai..., 124-125 : — Spanheim, 330-331. — Cf. Bussy, Cor., V, 17, (des erreurs), — Saint-Simon, Mém., XVII, 179, note 3 (des erreurs), — Jung, Rev. B., 1875, 19 octobre, p. 377, col. 1 (des erreurs), — Rousset, I, 341 (des erreurs).

[70] La guerre présente ayant obligé de mettre en lieu sûr les volumes de la Corresp. polit., je n'ai pu consulter ceux qui concernent les affaires d'Allemagne, d'Autriche, de Cologne et de Danemark. Tout en le regrettant vivement, je crois que mon opinion, formée après la consultation des autres volumes, n'aurait pas été modifiée (v. Bibliographie).

[71] Il en informe divers personnages en France : A. N., Guerre A1, 256 min., septembre f° 56, 60, 70-71 et 137, — 259 orig., pièces 235, 238, 243 et 286.

[72] A. E., Cor. pol., Turquie, 10 ; — Venise, 92 ; — Portugal, 8 (le t. 12 est inutile).

[73] Id., Angleterre, 101 : les lettres de Louvois sont mentionnées dans la table, mais ne se trouvent pas dans le volume.

[74] Id., Hollande, 91.

[75] Et non marquis.

[76] A. E., Cor. pol., Prusse, 8, 6, pub. dans Recueil des Instr., Prusse, 172.

[77] Id., f° 18, Louvois à Saint-Géran, 18 décembre 1671.

[78] Id., Mayence, II, f° 92, 97, 112, 116-7, 124, 127, let. de Louvois à l'abbé de Gravel. — Cf. A. N., Guerre A1, 265 tr., f° 163 v°, — 272 tr., f° 489, Louvois à Le Tellier, 10 janvier 1672.

[79] A. E., Cor. pol., Sardaigne-Savoie, 62 ; f° 191, Louvois à Saint-Maurice, 11 septembre 1671 : les autres lettres, au nombre de cinq, n'ont pas d'importance,

[80] Idem., Espagne, 60, f° 259 à 369, 20 documents du 12 septembre au 13 décembre 1671 : pour l'instruction et les lettres citées, f° 299, 342 et 350.

[81] Idem., Rome, 215 et 216 : environ 37 lettres de Louvois : Cf. Pomponne, Mém., 12-13. Les deux prélats seront compris dans la promotion de février 1672.

[82] Idem., Suède, 38, 28 lettres de Louvois.

[83] F° 188.

[84] F° 207, Louvois à Pomponne, 25 septembre 1671.

[85] Courtin, raconte-t-on, simule une maladie pour ne pas aller en Suède. Sur ce, Louvois plaisante : le diplomate tremble quand il est sur la mer et aura de grandes frayeurs en passant le Grand Belt et le Sund, etc., f° 254, 327, 342.

[86] Saint-Maurice, II, 161.

[87] A. E., Cor. pol., Mayence, II, l'ai 133-4 et 138, — Suède, f° 400, Rome, 216, f° 278. — V. ci-dessus, la première note de ce chapitre.

[88] A. N., Guerre A1, 257 min., octobre f° 213, — 227, novembre f° 186, — 260 orig, pièce 117, — 262 orig., pièce 163, — 272 tr., f° 285.

[89] A. N., Guerre A1, 272 tr., f° 389. Le frère du prince Guillaume de Furstenberg est François Egon, évêque de Strasbourg. L'archevêque-électeur de Cologne est Maximilien Henri de Bavière. L'évêque de Munster est Christophe Bernard de Galen, et son ministre Mathias de Schmising. Du côté français, Louvois est secondé par Louis de Verjus, comte de Crécy, qui, envoyé depuis un an en Allemagne, y négocie avec les princes rhénane.

[90] A. N., Guerre A1, 248 min., octobre f° 50 v°, Louvois à Créqui, 11 octobre 1671. — Id., 272 tr., f° 230-231, Mémoire du 14 octobre : à Metz, le commissaire séparera son argent dans les bougettes (valises) qu'il cachettera. Lesquelles il donnera à chacun desdits officiers, afin qu'ils ne paraissent que comme passants qui s'en vont chercher parti en Hollande. Ils pourront même supposer qu'ils sont déserteurs des troupes françaises. Id., 260 orig. : il s'agissait de 300.000 livres.

[91] A. N., Guerre A1, 272 tr., f° 425. Sur les tergiversations, — Id., 257 min., décembre f° 42, 52, 54, 62, 80 et 82, — 252 tr., f° 276 v°, — 260 orig., pièce 287, — 262 orig., pièces 409 — 412, — 272 tr., f° 401. — Les étapes de Louvois furent Arras (22 décembre), Tournai (25), Brühl (31), Metz (10 janvier 1672), Bonn (14), Nuits (25), Versailles (28). — Le 31 décembre, Guy Patin, III, 794, écrit à son ami Falconet : On dit que M. de Louvois est parti pour quelque affaire et qu'il est allé en Lorraine, dont on tire différentes conjonctures : il vaut mieux ne rien dire. Le mois de mars viendra qu'on se mettrai en campagne et alors on verra l'effet.

[92] A. N., Guerre A1, 272 tr., f° 402 v°, Louvois à Chamilly, 9 décembre 1671.

[93] Id., 266 min., janvier f° 1, — 265 tr., f° 114 v° et 146 v°, — 272 tr., f° 442 v°, Louvois au roi, 1er janvier 1672.

[94] Id., 257 min., décembre f° 134-7, — 266 min., janvier, février et mars (les lettres de Le Tellier sont en janvier). Celles de Louvois sont au nombre de six : les quatre mémoires chiffrés et les quatre lettes ou billets de Le Tellier manquent.

[95] A. N., Guerre A1, 265 tr., f° 155, 163 v°, 186 et 189, — 272 tr., f° 427, 440, 467, 489, 527, 532, Louvois à Le Tellier, 25 décembre 1671, 1, 4, 10, 14 et 19 janvier 1672.

[96] Id., 265 tr., f° 162, pouvoir pour traiter : f° 170, traité de ligue offensive avec l'électeur de Cologne : f° 183, articles convenus avec l'évêque de Munster.

[97] La Fare, Mém., 68.

[98] V. le chapitre sur Le Tellier chancelier.

[99] Mme de Sévigné, II, 492, donne cette date. La Gazette, 1672, 6 février, p. 142, et d'Ormesson, II, 624, ne précisent pas. Spanheim, p. 330, se trompe d'année. Dans A. N., Guerre A1, 299 orig., se trouve une série de lettres de félicitations toutes emphatiques et boursouflées.

[100] Le Pelletier, Mém., 138.

[101] Feuquières, Mém., édit. de 1740, I, 31-2, 36-8 : — La Fare, Mém., 66-7 : Courtilz de Sandras, Test. pol. de Co5ert, 237 : — Relazioni..., Francia, III, 254-5 : il est raconté que, dans le régiment de Magalotti, 150 soldats veulent déserter parce que Louvois attribuait ai di lui particolare profitto quelle contribuzioni che dovevano essere compartite ha gli eserciti.

[102] V., dans Rousset, I, 515, le mémoire où elles ne sont nullement dissimulées.

[103] A. N., Guerre A1, 248 min., septembre f° 240, — 252 tr., f° 50 v°, Let. du 28 septembre 1670. Le 1er décembre, il écrit au maréchal de Créqui : Vous me permettrez de douter que les Hollandais doivent avoir de la joie de ce que les troupes du roi demeureront jusqu'au mois d'avril en Lorraine, puisque ce serait dans ce temps-là qu'il faudrait marcher pour aller contre eux, si l'on en avait le dessein : A. N., Guerre A1, 249 min., décembre f° 1 et 18.

[104] A. N., Guerre A1, 259 orig.. pièce 10, Montpezat à Louvois, 1er août 1671.

[105] Id., 256 min., août f° 203, — 261 orig., pièce 184, Louvois à Heiss, 18 août 1671.

[106] Id., 256 min., août f° 331 v°, — 261 orig., pièce 235, Louvois à Vauban, 29 août 1671.

[107] Id., 273 tr., f° 731.

[108] Id., f° 751, Louvois à Croissy, 6 avril 1672. Malgré le traité de Douvres et par suite de l'opposition de la chambre des Communes, Croissy est engagé dans des négociations difficiles ; aussi Louvois l'informe-t-il avec soin.

[109] A. N., Guerre A1, 274 tr., f° 484, — 282 orig., pièce 102, — 291 fr., pièce 98, ou Louis XIV, Œuv., III, 272.

[110] Les indications sont dans A. N., Guerre A1, 266 et 268 min., 273 tr., — 275 et 292 orig. Les étapes furent Laon (29 avril), Rumigny (30), Charleroi (1er mai), Marchinelle (6), Liège (9), Vizé (13), Mazeik (20), Nuits (22), Keyserwerk (24), Orsay (3 juin), Wesel (8), Emmerich (9), Doesburg (18), Arnheim (16), Utrecht (1er juillet), Nimègue (13), camp de Gand (15), camp de Boxtel (19-24), Saint-Germain (3 août).

Louvois aurait-il été superstitieux ? Le 15 novembre 1671, il écrit à Le Pelletier de Souzy, intendant à Lille : L'on m'a dit que le sixième de ce mois, sur les six heures du soir, l'on avait vu paraître à Lille durant demi-quart d'heure une comète affreuse par sa couleur, qui était d'un rouge ensanglanté, dont la queue était tournée vers la Hollande. Je vous prie de me mander si cela est véritable et ce que vous en avez remarqué : A. N., Guerre A1, 257 min., novembre f° 97 v°.

[111] Louvois accuse réception des lettres écrites par son père les 30 avril, 1, 7, 10, 14 mai, 7 et 11 juin, I er juillet 1672 : ces neuf lettres manquent. Il existe seulement un mémoire, peu important, du 23 juin : il s'agit de demandes d'emploi par des officiers, d'augmentation de solde dans certaines garnisons, de pénurie des fourrages dans le Roussillon, etc. : les compagnies de Picardie, qui viennent tous les jours, arrivent de plus belles en plus belles, A. N., Guerre A1, 273 tr., f° 207.

[112] Mme de Sévigné, III, 41 et 102, 27 avril et 6 juin.

[113] A. N., Guerre A1, 267 et 268 min., — 271, 275 et 293 orig., 273 et 274 tr.

[114] Id., 293 orig., pièce 85, Carpatry à Louvois, 14 mai 1672 : Monseigneur m'a commandé d'envoyer à MM. Boistel et Charpentier un mémoire de plusieurs choses sur lesquelles il a besoin de quelques éclaircissements, afin qu'après avoir sur cela vos ordres ils puissent faire réponse sur chacun article. Il en a usé de cette sorte pour ménager votre temps et vous épargner dé la peine. Le Boistel, parent de Le Tellier, et Charpentier sont des commis restés à Paris ; sur eux, v. L. André, Michel Le Tellier, 644 et notes : pour Carpatry, ajouter A. N., Guerre A1, 425 min., 152 et 293, let. de Louvois, 7 mai et 24 juin 1675.

[115] A. N., Guerre A1, 267 min., mai f° 35, juin f° 34, Louvois à Villacerf, 18 mai 1672, — Carpatry et au prévôt des marchands, 14 juin 1672. — Sur la question des carrosses, v. Saint-Simon, Mém., V, 39-40.

[116] Id., 273 tr., f° 63, — 275 orig., pièce 286, let. du 4 mai 1672.

[117] Id., 273 ti., f° 91, 275 orig., pièce 322, let. du 11 mai 167.

[118] Id., 267 min., f° 70, — 275 orig., pièce 424, let. du 30 mai 1672.

[119] Id., 273 tr., f° 193, let. du 30 juin 1672 ; incomplète dans 276 orig., pièce 70.

[120] Id., 273 tr., f° 202 et sq., — 276 orig., pièce 106, let. du 20 juin 1672.

[121] Id., 267 min., juillet f° 2, let. du 2 juillet. — J'ai tenu à citer cette phrase, parce qu'elle confirme sans réserves l'opinion catégorique des contemporains sur la divergence de vues entre Pomponne et Louvois, le premier étant d'avis de proposer aux Hollandais des conditions modérées pour se retourner contre les Espagnols, le second entendant humilier les Provinces-Unies qui, en 1668, se sont mises en travers de la politique française : Louis XIV adopte l'opinion de Louvois. Les contemporains étant unanimes à cet égard, je ne renverrai qu'a deux d'entre eux, Feuquières, Mém., I, 36-8, et Francesco Michiel, dans Relazioni, Francia, III, 264.

[122] A. N., Guerre A1, 267 min., mai f° 70, — 275 orig., pièces 322, 361 et 424, — 276 orig., pièces 70 et 106, — 273 tr., f°. 91, 127, 193 et 202, Louvois à Le Tellier, 11, 18 et 30 mai, 15 et 20 juin 1672.

[123] Id., 273 tr., f° 230 et 255, — 275 orig., pièce 242, — 276 orig., pièce 332, Louvois à Le Tellier, 9 juillet et à d'Estrades, 23 juillet 1672.

[124] A. N., Guerre A1, 273 tr., f° 257-9, — 275 orig., pièce 335, Louvois à Luxembourg, camp de Boxtel, 24 juillet 1672, La lettre est capitale : On ne peut pas mieux répondre que vous avez fait à celui qui vous a parlé de la part de M. de Witt. Continuez et, sans lui rien donner par écrit, laissez-lui entendre que le roi oublierait volontiers la méchante conduite passée de son ami et ne serait point fâché de le voir remonter sur sa bête, Que, marque de cela, il ne trouvera point dans aucune des propositions faites par le roi quoi que ce soli qui lui soit contraire. Et que Sa Majesté s'est toujours défendue d'entrer dans rien de semblable, quoiqu'Elle en ait été fort sollicitée par les ambassadeurs anglais. Que l'on entendra volontiers aux propositions qu'il pourra faire pour que l'on lui donne le moyen de rétablir ses affaires, pourvu que, de son côté, il fasse faire une paix avantageuse au roi, dans laquelle il faut qu'il se mette dans l'esprit qu'il ne peut point, quant à présent, détacher les intérêts des deux rois, quoique, dans la suite, Sa Majesté fût bien aise que la Hollande ne gardât aucune dépendance d'Angleterre. Que si M. de Witt veut, sur ce pied-là parler clairement, il sera très bien reçu et il peut s'assurer que personne n'aura connaissance de la négociation qu'il aura fait faire avec le roi, pourvu que Sa Majesté n'apprenne pas que l'on se serve du commerce, que M. de Witt aura introduit avec le roi, pour persuader au roi d'Angleterre que ce soit pour faire la paix sans lui. A quoi je vous puis assurer que le roi n'entendra jamais, quand même il devrait prévoir qu'il lui en dût conter toutes les conquêtes qu'il a faites. De quoi vous voyez bien qu'il est bien éloigné.

[125] Le Pelletier, Mém., 138.

[126] Spanheim, 334.

[127] Brienne fils, II, 252 : — A. N., Guerre A1, 285 tr., pièce 21, — 286 orig., pièce 334, Turenne à Louvois, 23 juillet 1672. — Cf. Artagnan, IV, 126.

[128] B. N., f. fr., 12687, 57, ou Nouveau Siècle de Louis XIV, 102.

[129] Saint-Maurice, II, 293 et 295. — Cf. Louis XIV, Œuv., III, 116-121, où sont des états dressés par Turenne lui-même, qui se souvient de l'insuffisance de la préparation en 1667 et essaie d'y remédier en intervenant directement : — Aumale, VII, 364-365.

[130] A. N., Guerre A1, 273 tr., fi" 274-5, 277 à 284, 324, 328 à 333, 350, 386-8, — 277 orig., pièces 36, 42, 83, 103, 135, 159, Louvois à Chamilly, 6 août, à Turenne, 7, 13, 16, 20 et 23 août 1672.

[131] Id., 276 orig., pièces 9, 131 et 206, — 277 orig., pièces 78 et 247, 283 tr., pièce 162, — 2M tr., pièce 163, — 285 tr., pièce 88, — 286 tr., pièce 24. Turenne à Louvois, 3 et 23 juin, 3 juillet, 12 et 30 août 1672.

[132] Id., 287 tr., pièce 66, Turenne à Louvois, 5 octobre 1672.

[133] A. N., R2, 58, Louvois à Turenne, 10 octobre 1672.

[134] A. N., Guerre A1, 269 min., octobre f° 117, — 274 tr., fol 23 et sq., — 279 orig., pièce 170 bis, Louvois à Turenne, 13 octobre 1672.

[135] Id., 269 min., octobre f° 305, — 274 tr., f° 68, — 279 orig., pièce 412, Louvois et Turenne, 28 octobre 1672. — Dans sa réponse du 4 novembre, Turenne accepte : Id., 274 tr., f° 123-4, — 280 orig., pièce 31, — 288 tr., pièce 102.

[136] Id., 269 min., novembre f° 81 et 94, — 280 orig., pièces 114 et 120, — 274 tr., f° 128, let. des 10 et 11 novembre. Dans la pièce 1 du transcrit 289, on lit : Les lettres de M. de Turenne feront connaître les raisons pour lesquelles il demeura si longtemps sur la rivière de la Lahn et l'impossibilité où il était de faire éloigner les ennemis d'auprès Francfort. — Cf. Id., 270 min., f° 4 et 188, — 274 tr., f° 242, 363, 379 et 400, — 281 orig„ piètes 16, 184, 221 et 265, autres récriminations de Louvois sur l'absence de nouvelles.

[137] Id., 280 orig., pièce 277, — 281 orig., pièce 270, a 282 orig., pièces 4 et 146-147, — 289 tr., pièces 31 et 119, — 290 tr., pièces 4 et 28, — 291 tr., pièces 33, 48 et 146, let. de Turenne à Louvois, du 10 novembre au 15 décembre 1672.

[138] Id., 270 min., f° 326, — 274 tr., f° 545, — 282 orig., pièces 151-8. Louis XIV è Turenne, 25 décembre 1672. — Avec Condé, au contraire, lès rapporte sont restés excellents. D'après d'Artagnan, le prince est plus politique que Turenne avec les ministres... il sait bien que, quand on a autant à perdre qu'il a, on ne doit pas dire toujours ce que l'on pense... : IV, 126. Sans doute, mais Condé n'avait, à ce moment, aucun sujet d'animosité contre Louvois et Le Tellier, principaux auteurs de son rappel à l'activité et de sa nomination au commandement de l'armée de Lorraine. Ce sont de véritables effusions d'amitié de la part de Louvois et du prince : Je voue prie d'assurer M. votre père de mon service... Vous voudrez bien prendre la peine de faire mes compliments à M. Le Tellier que je n'ai pu voir devant que de partir :o. Louvois tient Condé au courant des instructions successives données à Turenne : le prince, de son côté, informe le ministre que, le maréchal ne s'expliquant pas clairement, il attend de nouveaux renseignements. Louvois recommande alors à Turenne d'informer a fort distinctement Monseigneur lé prince sur ses résolutions. A. N., Guerre A1, 268 min., août f° 81, — 269 min., octobre f° 323 v° et 382 v°, et novembre f° 33, 36, 66, 68, 69 et 71-72, 102, 104, 128, 137 v°, 140 v°, 152, 154, — 273 tr., f° 200 v°, — 274 tr., f° 101, 112, 114, 138, 161, 165 et 170, — 285 tr., pièce 93, — 291 tr., pièce 276 orig., 93, — 277 orig., pièces 74 et 94, — 279 orig., pièce 457, — 280 orig., pièce 29, 83, 97, 121, 135, 142, 153 et 155.

[139] Id., 269 min., novembre f° 30 et 34, — 276 min., f° 50 et 291, — 273  tr., f° 489, — 274 tr., f° 96, — 277 orig., pièce 251, — 280 orig., pièce 29, — 282 orig., pièce 14, let. de Louvois, 31 août, 3 novembre, 6 et 17 décembre 1672.

[140] Id., 270 min., 282 orig., 274 et 314 tr. Les étapes sont Tournai, Ath, Lille, Saint-Germain.

[141] Id., 270 min., f° 301, Louvois au roi, 21 décembre 1672.

[142] Id., 291 tr., pièce 107, Descarrières à Louvois, 22 décembre 1672 : Lorsque le canon est repassé de matin, sous le pont de cette ville, les botteresses, qui sont des femmes pires que les harengères, lesquelles font ici ce que les crocheteurs font à Paris, se sont mises faire des huées sur la rivière et à se moquer de ceux qui les conduisaient, leur criant : Ha, Ha, ils voulaient prendre Charleroi et ils n'ont pas pu prendre Tongres !

[143] V., p. ex., Louis XIV, Œuv., III, 269, 272, 275-6, 283, ou A. N., Guerre A1, 274 tr., f° 483-4. 518, 520, 527, — 282 orig., pièces 73 et 74, 101 et 102, 126 et 128, 140 et 143, — 291 tr., pièces 89, 98, 116 et 1378 let. des 21-24 décembre 1672.

[144] A. N., Guerre A1, 270 min., f° 297, 299, 314-315, — 274 tr., f° 470 et 500, — 282 orig., pièces 71 et 99, let. des 21 et 22 décembre. D'Ath, il écrit : Je suis en sûreté ici et, présentement que j'y suis arrivé, je ne me commettrai en rien et ne marcherai en campagne qu'en bonne compagnie. Il n'en a pas été de même dans mon voyage où je n'ai pu avoir que de fort méchantes escortes. Mais, dans ces occasions-là une grande diligence de marcher jour et nuit tire d'ordinaire les gens d'affaires.

[145] Id., 270 min., f° 293, — 274 tr., f° 435, — 282 orig., pièce 24, Louvois à Condé, 18 décembre 1672.

[146] Id., .270 min., 274 et 291 tr., 282 orig.

[147] Id., 274 tr., f° 349, 442, 448, 465 et 476, — 282 orig., pièces 27 et 28, 44, 45, 47, 59, 75, — 291 tr., pièces 55, 63, 78, — 270 min., f° 295 et 305 : let. du 18 au 21 décembre 1672.

[148] Pellisson, Let. hist., I, 265 : — Le Pelletier, Vie..., 99.

[149] Louis XIV, Œuv., III, 271, 290 et 300, ou A. N., Guerre A1, 274 tr., f° 484, 569 ; 638, — 282 orig., pièces 101 et 102, 181 et 186, 250 et 251, — 291 tr., pièces 98, 151 et 190, let. des 22, 26 et 29 décembre.

[150] A. N., Guerre A1, 274 tr., f° 523, — 282 orig., pièce 142, Carpatry Louvois, 21 décembre 1672 : — Louis XIV, Œuv., III, 290, le roi à Louvois, 26 décembre 1672.

[151] Saint-Maurice, II, 467 et 488 : il attribue la cause du mal au chagrin qu'a témoigné le roi à M. de Louvois de ce que les places frontières étaient dégarnies.

[152] Le Pelletier, Vie..., 99.

[153] B. N., Collect. Cangé, 68, fou 210-2, Le Tellier au roi, 25 décembre 1672 (V. cette lettre à l'appendice) : Louis XIV, Œuv., III, 285-286, ou A. N., Guerre A1, 274 tr, f° 563, — 282 orig., pièce 181, — 291 tr., pièce 151, Louis XIV à Louvois, 26 décembre 1672.

[154] Mme de Coulanges à Mme de Sévigné, 26 décembre 1672, dans Mme de Sévigné, Let., III, 175.

[155] V., p. ex., A. N., Guerre A1, 291 tr., pièce 118, — 310 orig., pièce 290, — 356 orig., pièce 1, let de Damorezan, Cartier et Talon à Louvois, 23 décembre 1672, 1er janvier et 6 avril 1673.

[156] Id., 282 orig., Carpatry à Louvois, 26 décembre 1672 : Junquières sera le secrétaire indispensable de Le Tellier chancelier.

[157] Id., 301 min., février f° 4 et 13, — 302 min., f° 82, let. de Louvois à Le Bret, 1er février 1673, et à Aubeville, 6 mars.

[158] Id., 343 orig., pièce 151, — 356 orig., pièces 9 et 24, — 359 orig., pièce 25, lettres de félicitations, 7, 11, et 30 janvier et 15 octobre 1673. Cette dernière, envoyée à Le Tellier par le marquis de Rochefort, présente de l'intérêt : j'ai appris... le bon état de votre santé. Il n'est pas besoin, Monseigneur, que je vous fasse de grandes protestations pour vous persuader que j'en souhaite la continuation et l'augmentation plus qu'à moi-même.

[159] Relazioni....., Francia. III, 286-287 : Primi Visconti, 34.

[160] A. N., Guerre A1, 270 min., f° 357, — 282 orig., pièce 202, Louvois à Pomponne, 27 décembre 1672.

[161] Id., 301 min., janvier f° 57 v°, — 314 tr., f° 10, — 344 orig., pièce 23, Louvois à Condé, 7 janvier 1673. Louis XIV avait dû changer d'opinion, puisque, dans une lettre au roi du 1er janvier, Condé déclare avoir été étonné des grandes choses que Louis XIV veut entreprendre : Id., 318 tr., — 344 orig., pièce 1.

[162] Id., 301 min., janvier f° 56, — 3T4 tr., f° 6, — 319 tr., f° 319, 321 et 571, — 344 orig., pièces 23, 108 et 138. Les impressions de Condé sur l'Alsace sont fort pessimistes.

[163] Id., 318 tr., f° 147 v°, — 319 tr., f°' 42, 282-3, — 320 tr., f° 10. 344 orig., pièces 36, 73, 105, 171, — 352 orig., f° 9, 20 et 36, — 353 orig., f° 56, 71, 84 et 94, let. des 12, 13 et 29 janvier et 11 février 1673.

[164] Id., 302 min., f° 179, 180, 250 et 335, — 314 tr., f° 184, 230 et 348 v°, — 345 orig., pièces 77, 100 et 126, — 352 orig., f° 106-7, let, des 11, 14 et 18 mars 1673. Cf. Primi Visconti, p. 6-7.

[165] Id., 345 orig., pièce 107, Louvois à Rochefort, 15 mars 1673.

[166] Id., 302 min., f° 423, — 314 tr., f° 267 v°, — 334 orig., pièce 534 Louvois à Robert, 23 mars et à Luxembourg, 1er avril 1673.

[167] Id., 318 tr.. f° 108, — 319 tr., f° 395. — 332 orig., pièces 41 et 153, Luxembourg à Louvois, 10 et 31 janvier 1673 : Les Hollandais font toujours de grandes démonstrations apparentes de vouloir faire quelque entreprise. Je pense qu'on pourra dire sur cela, paturiunt montes, et attendre sans s'alarmer le ridiculus mus qui en naîtra.

[168] Id., 303 min., f° 13, — 315 tr., f° 3, — 346 orig., pièce 3, Louvois à Turenne, 1er avril 1673.

[169] Id.. 303 min., f° 234 v°. — 315 tr., f° 81, Louvois au marquis de Villars, 13 avril 1673. Il avait fait plusieurs projets de partage des troupes au printemps. A propos de l'un d'eux, Turenne avait répondu que, seul, l'état des choses dicterait la résolution au roi : Id., 320 tr., f° 8, — 344 orig., pièce 171, — 352 orig., f° 35, — 353 orig., f° 94, let. du 11 février 1673.

[170] Arch. Doud., carton 224, liasse 900.

[171] Les indications sont dans les minutes des tomes 303-307, les transcrits 314-317, les originaux 334 et 336. Les étapes sont : Pont Sainte Maxence (3 mai), Raye (4), Péronne (5), Arras (8), La Bassée (12), Lille (13), près de Gand (15). Courtrai (17), divers camps (25 mai-10 juin), devant Maëstricht (11 juin-1er juillet), divers camps (5-14), Nancy (18), Thionville (24), Nancy (31 juillet-16 août), Lunéville (24), Raon l'Etape (25), Saint-Dié (26), Sainte-Marie aux Mines (27), Brisach (30), Ribeauvillé (2 septembre), Saint-Dié (4), Metz (7), Nancy (8), Liverdun (29), Essey (30), Vimbais (1er octobre), Neubecourt (3), Sainte-Menehould (4), Suippes (5), Pont Faverge (6), Neufchatel (7), Laon (8), Paris (11).

[172] Les lettres de Le Tellier sont dans A. N., Guerre A1, 339, 342, 347 et 360 orig.

[173] A. N., Guerre A1, 356 orig., pièces 124 et 185, — 360 orig., pièces 136 et 140.

[174] Id., 360 orig., pièces 216, 233, 247, etc.

[175] Id., 305 minutes, août f° 99, — 327 tr., f° 469, — 339 orig., pièce 263, — 342 orig., pièce 302, — 347 orig., pièce 147.

[176] Louvois accuse réception à son père des lettres du 21 mai (deux), des 20 et 21 (plus un mémoire), du 20 juillet, des 15 et 19 août, des 7, 10, 14 et 21 septembre et du 5 octobre. Tous ces documents sont absents. Il subsiste seulement les lettres des 2 et 3 juin, dans A. N., Guerre A1, 360 orig., pièces 326 et 332. Quant aux lettres de Louvois, elles sont beaucoup plus nombreuses dans les volumes de minutes que dans les transcrits.

[177] A. N., Guerre A1, 304 min., juin f° 238 et 275, — 315 tr., f° 340 v° et 354 v°, — 335 orig., pièces 118 et 140, let. des 24-25 et 28 juin.

[178] Id., 305 min., juillet f° 15 et 218, — 306 min., f° 66, — 316 tr., f° 1, 74 et 221, let. des 1er et 26 juillet et 10 septembre.

[179] Id., 305 min., août f° 160, — 316 tr., f° 144 v°, let. du 19 août.

[180] Id., 305 min., août f° 124 et 192. — 306 min., f° 66 et 140, — 316 tr., f° 128 v°, 165 v°, 221 et 239. let. des 16 et 22 août, 10 et 13 septembre.

[181] Id.. 304 min., mai f° 206, — 305 min., juillet f° 65 et août f° 1, — 307 min., octobre f° 69, let. des 26 mai, 6 juillet, 1er août et 7 octobre.

[182] Id., 360 orig.. pièce 332. Le Tellier à Louvois. 3 juin ; — 304 min., juin f° 71, Louvois au gouverneur de Belle-Isle, 12 juin. Les deux lettres ont été publiées par Rousset, 1, 202-4. Parmi ces affaires particulières, il est encore question d'interdire le séjour en France à la comtesse Colonna (Marie Mancini), celui de Paris aux exilés (à ce sujet, il est parlé de Bussy-Rabutin) : A. N., Guerre A1, 304 min., mai f° 215. — 306 min., f° 215, let. des 27 mai et 17 septembre : cf. Bussy-Rabutin, Mém., II, 258.

[183] Id., 304 min., mai f° 215,  305 min., juillet f° 155, — 306 min., septembre f° 140, let. des 27 mai, 21 juillet et 13 septembre 1673.

[184] Id., 316 tr., f° 5 v°, Louvois à Turenne, 1er juillet 1673.

[185] Id., 305 min., août f° 124,  216 tr., f° 128 v°, Louvois à Le Tellier, 16 août 1673.

[186] Id., 305 min., août f° 167, — 347 orig., pièce 341, — 351 orig., pièce 47, Louvois à Courtin, 20 août 1673.

[187] Id., 306 min., f° 122, Louvois au prévôt des marchands, 12 septembre 1673. Comparer avec une autre lettre adressée au même et de ton différent, Id., f° 239, 19 septembre 1673.

[188] Id., 327 tr., f° 50, 51-53, 58-60, 635-636, — 346 orig., pièces 81 bis et 188. Courtin à Louvois, 16 septembre et 3 octobre 1673.

[189] Id., 306 min., f. 276. — 316 tr.. f° 302 v°. Louvois à Courtin. 21 septembre 1673,

[190] Id., 336 orig., pièce 126, Louvois à Luxembourg, 22 octobre 1673 : les places réservées sont Wesel, Rheinberg, Rées, Schank, Arnheim, Grave et le fort Saint-André. Luxembourg dénie à Courtin le droit de se mêler de ce qui se passe à la guerre : A. N., Guerre A1, 330 tr., f° 7, — 336 orig., pièce 179, let. du 13 novembre 1673. — Cf. Idem, 308 min., fax 483 et 627, — 309 min., f° 468, — 317 tr., f° 833, — 349 orig., pièces 169 et 346, Louvois Courtin, 21 et 28 novembre et 22 décembre 1673.

[191] Id., 312 orig., pièce 26, — 324 tr., f° 29 vu, 203 et 242 v°, — 325 tr., f° 339 v°, — 327 tr., f° 576, — 328 tr., f° 195, — 335 orig., pièces 13 et 128, let. des 6 et 27 juin, 2 juillet, 21 août, 2 et 12 octobre 1673.

[192] Id., 326 tr., f° 98 et 99 v°, Condé à Louvois, 30 août 1673.

[193] Id., 327 tr., f° 31, — 328 tr., f° 30, Condé à Louvois, 16 septembre et 6 octobre 1673. Louvois s'en remet simplement à Condé pour les manœuvres exécuter en cas de marche du prince d'Orange vers le Rhin : Id., 307 min., f° 135 v°, — 317 tr., f° 123, let. du 14 octobre 1673.

[194] Let. du 5 septembre 1673 à Gourville, citée dans d'Aumale, VII, 246.

[195] A. N., Guerre A1, 346 orig., pièce 268, — 352 tr., f° 232, let. du 22 mai 1673. — Cf. Id., 306 min., f° 59 v°, — 316 tr., f° 217 v°, — 348 orig., pièce 50, Louvois à Turenne, 9 septembre 1673.

[196] Id., 305 min., août f° 159, — 316 tr., f° 150, — 347 orig., pièce 335, Louvois à Turenne, 19 août 1673. En réalité, Louvois se trompe en croyant que l'armée impériale compte seulement 25.000 hommes : cf. Id., 312 orig., pièces 73-74, Louvois à Condé, 10 septembre 1673. De plus, comme, à ce moment, on songe à conquérir la Franche-Comté, projet qui ne se réalisera pas alors, on conserve les troupes en Lorraine et Turenne ne recevra qu'un renfort de 900 hommes : Id., 306 min., f° 4, — 316 tr., f° 192 v°, — 348 orig., pièce 8, Louvois à Turenne, 2 septembre 1673. Louvois était persuadé que les impériaux n'attaqueraient pas les Français : Id., 305 min., août f° 248, — 316 tr., f° 173 v°, — 347 orig., pièce 370, Louvois à Turenne, 24 août 1673.

[197] Cette question de l'occupation du pont d'Aschaffenbourg tient une grande place dans la correspondance. Les lettres de Louvois des 10 et 27 juillet et 21 août 1673 sont dans A. N., Guerre A1, 305 min., juillet f° 109 v° et 232 et août f° 181, — 316 tr., fou 34, 80 v° et 161, — 347 orig., f 151, 226 et 347, — 352 orig., f° 296. — Cf. Louvois à Turenne, 30 août 1673 : — Id., 305 min., août f° 280, — 316 tr., f° 182 v°, — 347 orig., pièce 390.

[198] Id., 306 min., f° 60, — 316 tr., f° 218 v°, — 348 orig., pièce 30, Louvois à Turenne, 9 septembre 1673. Etant informé du projet d'offensive du maréchal, Condé a hâte d'apprendre son succès : Id., 327 tr., f° 160, à Louvois, 20 septembre 1673.

[199] Id., 326 tr., f° 38 v° et 203-4, — 327 tr., f° 7, — 347 orig., pièce 372, — 348 orig., pièces 23 et 76, — 352 orig., f° 387-8, let. des 25 août, 5 et 15 septembre.

[200] Id., 327 tr., f° 4, — 348 orig., pièce 76, — 352 orig., f° 384, Turenne à Louvois, 15 septembre 1673. Phrase souvent citée : Rousset, I, 496, — Ambert, 94, — Aumale, VII, 426, — Picavet, Docum. biogr., n° 144.

[201] Id., 306 min., f° 291, — 308 mira., f° 2 v°, — 316 tr., f° 310 v°, 317 tr., f° 428 v°, — 348 orig., pièce 122, — 349 orig., pièce 7, — 352 orig., f° 470, Louvois à Turenne, 22 septembre et 1er novembre 1673.

[202] Id., 306 min., f° 58, — 316 tr., f° 215 v°, — 348 orig., pièce 50, Louvois à Turenne, 9 septembre 1673. D'autres lettres sur le même sujet, 22 septembre, 5 et 20 octobre sont dans Id., 306 min., f° 291, — 317 min., f° 34 et 324, —316 tr., f° 311, — 317 tr., f° 66 v° et 228 v°, — 348 orig., pièces 122, 196 et 289.

[203] Id., 307 min., f° 506, — 308 min., f° 384, — 317 tr., f° 354 et 555, — 348 orig., pièce 321, — 349 orig., pièce 137, — 352 orig., f° 553, Louvois à Turenne, 26 octobre et 17 novembre 1673.

[204] Id., 328 tr., f° 4, — 329 tr., f° 287, — 348 orig., pièce 189, — 349 orig., pièce 91, — 352 orig., f° 527, Turenne à Louvois, 4 octobre et 10 novembre 1673.

[205] Id., 309 min., f° 55, — 317 tr., f° 665, incomplet dans 349 orig., pièce 246, et dans 352 orig., f° 612, Louvois à Turenne, 4 décembre 1673.

[206] Id., 331 tr., f° 72, — 349 orig., pièce 261, — 352 orig., f° 633, Turenne à Louvois, 8 décembre 1673. L'intendant Camus de Beaulieu indique quelques étapes du voyage de retour, 14-15 décembre 1673 : Id., 331 tr., f° 262-263.

[207] Id., 309 min., f° 371, — 317 tr., f° 785, — 349 orig., pièce 331.

[208] Mme de Sévigné, Let., III, 331, 339, 343.

[209] Détails dans Brienne fils, II, 284-285 : — La Fare, édit. 1716, I, 104-106 : — Villars, Mém., I, 17-29, 31 (n'a que 20 ans en 1673) : — Primi Visconti, 26-27 : — B. N., manuscrit italien, 1878, let. de Giustinian (sérieux) : — Mémoires ou Essai..., (bref et quelque fantaisie) : — Courtilz de Sandras, Test. pol. de Colbert, 331-332 (bref) : — Spanheim, 333-334 : — abbé de Saint-Pierre, 142 : — Ramsay, III, 238, 312-313 : — d'Auvigny, VI, 49, 57 (quelques détails : trop délayé et faire la critique).

[210] Rousset, I, 512-514 (bref et superficiel) : — Jung, Vérité sur le masque de fer, 348-350, 30 (long et peu précis) : — Aumale, VII, 425-426 (bref) ; — Ambert, 94-96, 122-123 (quelque fantaisie) ; — Picavet, Dern. ann., 449-461 (bon, d'après les sources).

[211] Gabriel de Roquette, 1626-1707, évêque d'Autun, de 1666 à 1702, aurait servi de modèle à Molière pour son Tartuffe. Pendant la Fronde, il est dans le Languedoc où il sert d'informateur à Le Tellier : en 1664, il est un de ses familiers (Ormesson II, 173). Il l'aide dans les affaires jansénistes, et en 1674 correspond avec Louvois. Sur lui, v. Pignot, Un prélat réformateur au XVIIe siècle, et Cauchie, Le gallicisme en Sorbonne.

[212] Le récit de l'abbé de Saint Pierre. Annal..., 142, est peu admissible.

[213] Pub. dans Let. et Mém. de Turenne, I. 444 : — Louis XIV, Œuv., III, 424 : — Rousset, I, 513 : — Ambert, 95-6 : — Picavet, Dern. années, 455-456.

[214] Ce dernier membre de phrase est tout à fait obscur. Turenne parle-t-il d'une façon générale ? Vise-t-il un cas particulier, le sien ? Du reste, bien souvent, la pensée du maréchal manquait de netteté : Condé ne comprenait pas toujours ce qu'il lui écrivait. Entre autres exemples, je signale celui-ci : Le roi sait bien que, quand il croira une chose contraire à son service et au bien de ses affaires : je ne prends rien sur moi quand je m'y soumets entièrement : A. N., Guerre A1, 327 tr., f° 1, — 348 orig., n° 76, — 352 orig., f° 382, à Louvois, 15 septembre 1673.

[215] Bussy, Corresp., II, 342, 8 avril 1674.

[216] A. N., Guerre A1, 383 tr., f° 207, — 410 orig., pièce 54, 13 janvier 1674.

[217] Id., 379 tr., pièce 78.

[218] V., p. ex., B. N., f. fr., 12687, p. 205 : — Nouveau siècle de Louis XIV, édit. Sautreau de Marsy, II, 123 (quelques variantes) : — Picavet, Dern. années, donne comme référence B. N., 12619, p. 117.