L’HISTOIRE ROMAINE À ROME

DEUXIÈME PARTIE — LA RÉPUBLIQUE

VI — LES GAULOIS.

 

 

Les Gaulois qui menaçaient Rome ne venaient pas directement de la Gaule, d’où ce peuple aventureux était déjà venu en Italie sous le règne du premier Tarquin. Dès lors, l’Italie était en partie gauloise et le fut plus tard. On sait qu’au temps de César, la Gaule s’étendait jusqu’au Rubicon, et que la ville de Lucques y était comprise. Le nom que porte Sienne, elle le doit aux Senones, comme la ville de Sens leur doit le sien.

C’étaient les Senones qui, après avoir pénétré jusqu’à Clusium (Chiusi), au cœur de l’Étrurie, rencontrèrent les Romains. Ceux-ci avaient envoyé en ambassade au Brenn ou chef gaulois, pour intervenir auprès de lui en faveur des Étrusques, trois Fabius ; ils devaient être fiers de protéger ceux qu’avaient si vaillamment combattus leurs ancêtres. Le Brenn répondit avec une fierté toute gauloise, mêlée d’un peu de jactance qui ne l’était pas moins, et déclara n’avoir jamais entendu parler des Romains, ce qui n’était guère vraisemblable. Le vieil orgueil des Fabius se révolta ; oubliant leur situation d’arbitres, ils se mirent dans les rangs étrusques, et attaquèrent les Gaulois. Les barbares indignés de cette violation du droit des gens, envoyèrent des députés s’en plaindre à Rome. La curie leur était favorable, le sénat voulait faire livrer les Fabius par des fériaux ; mais, au Forum, ne s’étaient pas conservées de même les traditions du droit international sabin ; les plébéiens se moquèrent des Gaulois et du droit des gens ; dans le Champ de Mars, les comices par centuries, devenus très démocratiques depuis leur amalgame avec les comices par tribus, par une de ces bravades qui plaisent à l’emportement des multitudes, choisirent pour tribuns consulaires les trois Fabius.

A cette nouvelle, les Gaulois, saisis d’une de ces colères que cette nation, dit Tite-Live (V, 37), ne sait pas réprimer, la furia francese, si célèbre depuis en Italie, les Gaulois se précipitent sur Rome. Les Romains passèrent le Tibre pour les arrêter au delà du fleuve[1], mais les Gaulois le franchirent plus haut. Les Romains le repassèrent alors, et, suivant la voie Salaria, s’avancèrent contre l’ennemi près de l’Allia[2], nom funeste : infaustum Allia nomen.

L’Allia est un des petits cours d’eau qui se jettent dans le Tibre vers le douzième mille au-dessus de Rome. Je n’hésite pas à le reconnaître avec M. Rosa, dans le cours d’eau appelé Scannabecchi, lequel descend des collines Crustuminiennes, comme on le dit de l’Allia.

Quant au champ de bataille, il faut le chercher de ce côté dans une plaine assez vaste, car le nombre des Gaulois était considérable[3]. Tite-Live nous apprend que pour résister à cette multitude, les Romains, beaucoup moins nombreux, avaient dû allonger leurs ailes, ce qui affaiblit leur centre ; il faut aussi qu’à l’est de cette plaine on trouve ces collines[4], sur lesquelles fut placée la réserve, qui tint bon quelque temps, grâce à sa position.

Ces diverses circonstances et la distance de onze à douze milles indiquée par les auteurs, me conduisent à placer le théâtre du combat de l’Allia dans la plaine qui s’étend entre le Tibre et les collines, sur une largeur d’environ deux milles et de la Marcigliana à Santa Colomba[5].

Ce lieu fut témoin d’un grand désastre : ceux de l’armée romaine qui occupaient les hauteurs de droite, bien que la principale attaque eût, été dirigée contre eux, purent regagner home. Ils se retranchèrent dans la citadelle, sans songer, tant leur précipitation fut grande, à fermer les portes de la ville ; tout le reste fut repoussé vers le fleuve. Un affreux carnage se fit sur ses bords, et beaucoup de fuyards en voulant gagner Véies périrent dans les eaux. Quelques-uns se réfugièrent dans un bois qui existait alors entre la voie Salaria et le Tibre.

On ne peut s’expliquer cette déroute des Romains que par la nouveauté de leur ennemi. Les Romains n’étaient pas accoutumés à ces hommes de grande taille qui poussaient des cris terribles, bondissaient et hurlaient comme des sauvages, et leur semblaient des bêtes féroces plutôt que des hommes[6]. Les descendants des guerriers gaulois qui sont maintenant à Rome ne rappellent leurs ancêtres que par leur fougueuse bravoure ; mais elle est réglée par la discipline ; ils marchent en silence au combat et ne ressemblent point à des bêtes féroces ; enfin les plus vaillants soldats de l’Europe sont les plus petits.

Les Gaulois, si impétueux dans l’attaque, ne se pressèrent pas de marcher sur Rome, qui était bien voisine ; étonnés de leur victoire, ils passèrent la nuit à chanter des chants guerriers, à faire des monceaux d’armes, à couper des têtes et à enterrer leurs morts, dont un tertre, près de Santa Colomba, contient peut-être les ossements.

Le lendemain de la bataille, vers le soir, ils arrivèrent aux portes de la ville, qu’ils furent bien surpris de trouver ouvertes. Personne ne paraissait pour la défendre ; craignant quelque embûche, ils s’arrêtèrent et établirent leur camp entre Rome et l’Anio[7], au nord de la villa Albani, sur les petites hauteurs où est la villa Chigi. A Rome, cette nuit se passa dans les transes et les gémissements. Renonçant à défendre la ville, on décida que le sénat et les hommes en état de porter les armes s’enfermeraient dans la citadelle du mont Capitolin. Les vieillards, pour ménager les approvisionnements du Capitole déclarèrent qu’ils mourraient dans leurs maisons.

On jugea, dit Tite-Live, que la perte des vieillards importait peu. Une portion du peuple gagna le Janicule et se répandit dans la campagne ; quant aux vieillards consulaires, un Fabius, qui était grand prêtre, les dédia solennellement aux dieux infernaux pour le salut de la patrie[8].

II fallait sauver le Palladium et le feu sacré. Les vestales, conduites par le flamen Quirinalis, les emportèrent avec elles, se dirigeant vers Cære[9] (Cervetri). Après avoir franchi le pont Sublicius, comme elles commençaient à gravir la pente du Janicule par la montée qui conduit aujourd’hui à la porte Saint-Pancrace[10], elles rencontrèrent un plébéien qui sortait de Rome dans une charrette avec sa femme, ses enfants et tout son avoir, comme je l’ai vu faire à tant de bourgeois romains pendant le choléra. Cet homme était pieux : il mit pied à terre, fit descendre de la charrette ses enfants et sa femme et y fit monter les vestales. Il y a encore des Romains qui en eussent fait autant, si, à l’époque du dernier siège, on avait transporté à Civita Vecchia le Santo Bambino d’Araceli.

Le lendemain, les Gaulois entrèrent par la porte Colline ; après avoir suivi les hauteurs du Quirinal, ils descendirent au Forum, et levant les yeux, virent le Capitole. Ils placèrent au bas un poste pour empêcher les sorties, et se répandant par la ville, commencèrent à la piller. Puis, étonnés de la solitude qu’ils rencontraient partout, ils revinrent par groupes vers le Forum. Presque toutes les maisons des plébéiens étaient fermées et leurs maîtres en fuite, mais celles des patriciens étaient ouvertes et dans chacune d’elles se voyaient assis au milieu de l’atrium, vêtus d’une robe blanche bordée de pourpre[11], des vieillards immobiles. Les Gaulois les prirent d’abord pour les statues des dieux. Un d’eux voulut s’en assurer et plus osé que les autres, par une espièglerie assez française, se mit à caresser la barbe de l’une de ces statues. Aussitôt le bâton d’ivoire de Papirius le frappa rudement[12]. Ce fut le signal de l’égorgement des vieux patriciens, ce fut le signal de la dévastation, de l’incendie[13] et du massacre de ceux qui étaient restés dans la ville : triste spectacle pour les défenseurs du Capitole. Cette vue ne fil point fléchir leur courage ; ils demeurèrent fermes sur cette petite colline, qui était Rome tout entière et contenait tout l’avenir de Rome[14].

Rassasiés de pillage, les Gaulois tentèrent d’emporter la citadelle par une impétueuse attaque. Au lever de l’aurore, on les vit se rassembler dans le Forum et, poussant des cris, couvrant leurs têtes de leurs boucliers, s’élancer par la montée triomphale. Les Romains ne leur en laissèrent pas atteindre le sommet ; ils les arrêtèrent à mi-hauteur[15] et se précipitèrent d’en haut sur les assaillants. Ceux-ci furent repoussés au pied de la colline avec un grand carnage.

Alors les Gaulois résolurent de prendre le Capitole par la famine, tandis qu’une partie de leur armée alla battre la campagne ; dans ces excursions, ils furent défaits en divers endroits, d’un côté par un coup de main des habitants d’Ardée, que dirigeait Camille et par une attaque des habitants d’Antium, de l’autre par deux sorties des Romains réfugiés à Véies, qui allèrent les chercher jusqu’au bord de la mer[16].

Le Capitole était serré de près ; l’ennemi faisait bonne garde pour empêcher les Romains de sortir et de s’approvisionner ; mais il ne put empêcher un jeune homme de la gens Fabia, gens pieuse et chargée depuis un temps immémorial du culte qu’on rendait dans l’antre du Palatin à Pan, sous son nom sabin de Lupercus, d’aller offrir un sacrifice sur le Quirinal où étaient la chapelle domestique de cette gens sabine. Fabius Dorso s’y rendit en effet, portant dans ses mains les choses sacrées, et ce devoir religieux accompli, revint au Capitole. Tite-Live explique le succès de cette entreprise hardie par l’étonnement des Gaulois et par leur respect pour la religion[17]. Il y a encore à cela une explication topographique ; à cette époque, le Quirinal tenait au Capitole par une langue de terre qui subsista jusqu’à Trajan. Il fut plus facile à Fabius d’aller de plain-pied de l’un à l’autre sommet qu’il ne l’eût été de descendre et de remonter du Capitole au Quirinal et du Quirinal au Capitole.

Pendant ce temps les réfugiés de Véies devenaient de jour en jour plus redoutables aux Gaulois. Ils voulaient mettre Camille à leur tête ; mais le respect des lois était alors si grand, qu’ils ne crurent pouvoir le faire sans y être autorisés par le sénat assiégé. Ce que Fabius Dorso avait osé pour la religion, un jeune homme nommé Pontius Cominius[18] l’osa pour la légalité, cette autre religion du peuple romain. S’embarquant sur l’écorce d’un chêne-liège[19], arbre qui n’est pas rare dans la campagne romaine, il descendit le Tibre depuis l’extrémité de la vallée qui, s’ouvrant en face de Fidène, conduit à Véies, jusqu’au point le plus proche du mont Capitolin, aux environs de la porte Carmen tale, le gravit par son côté le plus escarpé, celui qui regardait le fleuve, tellement escarpé alors, qu’on ne l’avait défendu par aucune muraille, et que les Gaulois avaient négligé de le garder, tandis qu’ils avaient mis un poste du côté du Forum, le seul par où le Capitole fût, croyaient-ils, accessible.

On fit ce qui était nécessaire pour rendre valide l’élection d’un dictateur et mettre un terme à l’exil de Camille ; une loi Curiata, c’est-à-dire, une loi votée par les curies patriciennes[20], rappela Camille, qui n’accepta pas la dictature avant que la loi eût été portée. C’est par ce respect des lois de Rome que le noble exilé se vengeait de son ingratitude.

Pendant ce temps, il s’en fallut de peu que la citadelle ne fût emportée. Les Gaulois voulurent prendre le chemin qu’avait pris Cominius, dont ils aperçurent les traces. Ayant découvert un endroit d’où l’on pouvait tenter de gravir le Capitole du côté par où il regardait la porte Carmentale[21], ils profitèrent d’une nuit très sombre, et ayant envoyé d’abord un des leurs sans armes, tenter l’ascension, ils lui passèrent leurs armes, puis là où ils rencontraient un obstacle, s’efforçant, à tour de rôle de le surmonter, se soulevant et se tirant les uns les autres, ils arrivèrent sans faire aucun bruit au pied de la citadelle. Tandis que les Gaulois montaient ainsi en rampant comme des Mohicans à travers les broussailles primitives du Capitole (au-dessus de la Montanara), les chiens n’avaient pas aboyé ; mais les oies, nourries dans un temple de Junon[22] voisin de la citadelle, plus vigilantes que les chiens, crièrent. Elles réveillèrent un personnage consulaire nommé Manlius[23]. Manlius crie aux armes, et s’élance à la rencontre de l’ennemi, renverse du choc de son bouclier le premier Gaulois qui était déjà arrivé. Celui-ci entraîne dans sa chute plusieurs de ses compagnons. Manlius égorge ceux qui embrassaient le rocher. Les soldats accourent à son aide, font pleuvoir des traits et des pierres sur les assaillants qui sont tous précipités. Manlius a sauvé le Capitole.

Le temple de Junon, d’où était parti l’avertissement divin, fut consacré depuis[24] à Junon qui avertit, Juno Moneta[25] ; c’est, je crois, la véritable origine de ce temple.

Sous le portique du temple fut placée une oie en argent[26] ; une cérémonie bizarre conserva la mémoire de la délivrance du Capitole. Chaque année on portait une oie en triomphe[27], et l’on crucifiait un chien entre le temple de Summanus et celui de la Jeunesse. Il est certain que les oies sont une meilleure garde que les chiens[28]. Enfin, pour terminer gaiement l’histoire des oies de Manlius, je rappellerai une caricature qui représentait un soldat français plumant une oie au Capitole ; au-dessous étaient ces mots : Vengeance d’un Gaulois.

Le siège du Capitole se prolongeait et ses vaillants défenseurs tenaient toujours. Plusieurs légendes qu’on retrouve ailleurs expriment la persévérance de leur résolution ; il en est deux qui se rapportent à l’origine de deux monuments qui durent être construits sur le Capitole et probablement dans la citadelle. L’un était l’autel de Jupiter Boulanger (pistor), érigé en mémoire des pains que les Romains jetèrent dans le camp des Gaulois pour leur faire croire que la farine ne leur manquait pas[29] et le temple de Vénus chauve, singulière épithète pour Vénus.

On l’expliquait en disant que les matrones romaines enfermées dans la citadelle, où il est bien douteux qu’il y eût des femmes, donnèrent leurs cheveux pour remplacer les cordes qui faisaient défaut aux machines de guerre[30]. Cette historiette, peu vraisemblable, a été souvent reproduite[31].

Les Gaulois commençaient à se lasser. Cette nation, impétueuse et mobile, ne connaissait pas la froide constance des Romains. Le siège avait commencé au milieu de juillet ; la commémoration annuelle de la bataille de l’allia ne permit jamais d’oublier cette date funeste. L’automne était venu[32] ; et avec l’automne le plus mauvais moment de la fièvre de Rome. Les environs du Forum où campaient les Gaulois étaient, grâce aux restes du Vélabre, particulièrement malsains. Les Gaulois mouraient par troupeaux sous ce ciel et dans cette saison trop souvent funestes. Un lieu où ils brûlèrent leurs morts conserva le nom de Bûchers gaulois (Busta gallica). Selon toute vraisemblance, il était dans le Forum[33] ou près du Forum.

L’impatience et la maladie décidèrent les Gaulois à traiter. Les Romains purent se racheter, et ils se rachetèrent pour mille livres d’or. Ce fut la rançon du Capitole.

Admettre là réalité de ce honteux marché res fœdissima, comme parle Tite-Live (V, 48), c’est à quoi l’orgueil romain ne voulut pas consentir. Il fallait que le plot si vraisemblable du barbare jetant son épée dans la balance et répondant au tribun qui disait la pesée d’or mal faite : Malheur aux vaincus ! il fallait que ce mot célèbre et que les Romains se sont vengés d’avoir entendu ; en l’adressant à toute la terre, ne fût pas le dernier mot d’une transaction humiliante. Pour cela, on imagina un fait de toute invraisemblance, mais beaucoup plus agréable à raconter.

Avant que l’odieux marché[34] fût accompli, avant que tout l’or fût pesé, Camille survient, il ordonne que l’or soit emporté et que les Gaulois se retirent. Ceux-ci allèguent la convention faite, il répond qu’elle est nulle, parce que lui, dictateur, ne l’a pas approuvée et qu’un magistrat, son inférieur, n’avait pas le droit de la faire. Puis il engage les Gaulois à se préparer au combat. Ils obéissent, laissent Camille disposer son armée comme il l’entend sur le sol inégal de Rome, embarrassé de décombres ; ils l’avaient bien laissé arriver dans la citadelle, et le Brenn n’avait pas répondu à ses arguments constitutionnels en le faisant jeter au bas de la roche Tarpéienne.

Avant la sagacité de Beaufort, le bon sens de l’antiquité avait protesté contre une invention, il faut le dire, si absurde. Polybe (II, 22), qui, en sa qualité de Grec n’était pas intéressé à soutenir les mensonges de la vanité romaine, dit positivement, que les Gaulois remportèrent dans leur pays, sans être inquiétés, la rançon des Romains, Suétone (Tibère, 3), plus curieux des faits que passionné pour la gloire de la république, parle de l’or donné aux Gaulois lors du siège du Capitole, et qui, ajoute-il, ne leur fut point arraché par Camille. Le savant Pline (H. n., XXXIII, 5,1), Justin, Diodore de Sicile et Tacite, affirment nettement que les Romains achetèrent la paix des Gaulois. Oui, le fait est incontestable. Cette paix fut achetée et payée argent comptant[35].

Le Capitole, qui a vu tant de gloire, a vu cette honte des Romains. Si la pensée en venait au triomphateur tandis qu’il gravissait l’orgueilleuse colline un jour humiliée, il y avait là plus encore que dans les railleries permises au soldat de quoi tempérer l’ivresse du triomphe.

Peu de récits d’ailleurs étaient aussi hardiment faux que le récit suivi par Tite-Live ; dans la plupart on cherchait à faire un compromis entre l’orgueil et la vérité. Les Gaulois avaient emporté l’or des Romains, mais Camille le leur avait repris[36], les avait exterminés à huit milles de Rome, sur la route de Gabie et tué leur chef en lui disant à son tour : Malheur aux vaincus[37]. Il fallait bien que les Romains eussent leur revanche.

Rome délivrée des Gaulois, une question s’agita qui importait beaucoup à la, composition future de ce livre, car elle eût pu être tranchée de telle sorte qu’il s’arrêterait ici. Les plébéiens, les tribuns en tête, voulaient aller habiter Véies ; les patriciens, plus enracinés au sol, repoussèrent obstinément un tel dessein, et Camille le fit abandonner. L’imagination a peine à se persuader que Rome eût pu être ailleurs que là où elle est aujourd’hui. Quoi ! ses collines seraient un lieu abandonné où l’on viendrait voir le soleil se coucher dans la solitude, tandis qu’à l’isola Farnèse s’élèveraient les ruines du Colisée !

Camille insista sur ce fait que le sol de Rome était sanctifié par le culte, que les sacrifices se faisaient dans des lieux aussi bien qu’à des jours déterminés[38] ; on sent à chaque mot du discours que Tite-Live lui fait prononcer combien Rome était pour les Romains une ville sacrée, et cela donne un grand intérêt aux monuments et à la détermination de la place qu’ils occupaient, car cette place ne pouvait être changée sans sacrilège, et la connaître c’est connaître, pour ainsi dire, un des articles de foi de la religion romaine.

Camille, d’après Tite-Live (V, 54), eut un mouvement sublime quand il s’écria, faisant allusion à son exil : Absent, chaque fois que le souvenir de la patrie me revenait, je voyais toutes ces choses que vous voyez, ces collines, les plaines et le Tibre, cette région à laquelle mes yeux sont accoutumés, où je suis né et où j’ai été élevé. Ah ! que ces objets vous touchent de leur amour et vous retiennent dans votre patrie, plutôt qu’ils ne vous consument de regrets quand vous les aurez quittés. Cette noble allusion à l’exil, cette pathétique évocation de la patrie, de ses montagnes, de ses champs, de son ciel, émut les cœurs, et Rome resta à Rome.

Camille ne l’eût pas emporté peut-être si la multitude n’eût cru voir dans une rencontre fortuite la manifestation certaine de la volonté des dieux. Quelques jours après, les sénateurs délibéraient sur le même sujet dans la curie ; des soldats traversèrent le Forum et le centurion, arrivé au milieu du Comitium, dit au porte-étendard. Arrête-toi : nous serons très bien ici[39]. Le sénat sortit de la curie et du haut des degrés cria au peuple rassemblé dans le Forum : Nous en acceptons l’augure. La plebs, que la voix de Camille n’avait pu décider, le fut par une parole qu’un centurion prononça au hasard. C’est bien le même peuple qui, de nos jours, entendant un nom de nombre que le hasard amène dans la conversation, va le mettre à la loterie, croyant toujours à la valeur prophétique d’un mot.

Quand on eut renoncé à quitter Rome pour Véies, on se mit à rebâtir Rome avec ardeur, et avec une précipitation dont nous devons tenir compte, car c’est à cette précipitation qu’il faut attribuer la physionomie que Rome conserva[40] jusqu’à ce qu’elle eût été bâtie de nouveau sous Néron, qu’elle ne perdît même pas entièrement après lui[41] et qu’elle garde encore aujourd’hui.

Le sénat, qui avait eu tant de peine à empêcher l’émigration des plébéiens, et qui faisait tout pour leur faciliter la réédification de la ville[42] ne s’avisa pas de réglementer, et chaque citoyen put bâtir où il lui plaisait ; de là résulta un pêle-mêle d’édifices incohérents[43]. Ces rues tracées à la hâte furent étroites, tortueuses et irrégulières[44], de grands espaces demeurèrent vides[45], comme on le voit partout où les villes ont été bâties précipitamment, dans l’ancien et dans le nouveau monde, à Athènes et à Washington.

Les temples et les monuments publics étaient restés debout[46]. Les Gaulois, ces premiers barbares, ne détruisirent pas plus les édifices de Rome que ne le firent, comme nous le verrons, les autres barbares, et par la même raison. Détruire un édifice leur eût donné beaucoup de peine et ne leur eût servi à rien. A Rome on n’a guère détruit que pour bâtir.

Outre les anciens temples qui subsistèrent, on en construisit de nouveaux et on en reconstruisit d’anciens ; j’ai mentionné celui d’Aius Locutius dans la rue Neuve et celui de Junon sur l’Aventin ; il faut y joindre un temple de Mars voué pendant l’invasion gauloise[47].

Ce temple était hors de la ville et faisait face à la porte Capène[48] ; un portique[49] y conduisait, pareil à ceux qui, au moyen âge, conduisaient à Saint-Pierre et à Saint-Paul et auxquels il a pu servir de modèle, car il existait encore au moyen âge.

Les Romains avaient vu le danger de ne pas fortifier du côté du Tibre le mont Capitolin, qui fut alors pour la première fris protégé par des murailles ; on ne dut pas oublier la citadelle, où  le besoin de moyens de défense s’était fait le plus sentir, et elle dut avoir sa part dans ces substructions du Capitole[50], que Tite-Live (VI, 4) disait admirables et Pline démesurées (insanas)[51].

Pour compléter l’histoire de tout ce qui se rapporte à la délivrance du Capitole, il faut raconter la fin de son premier sauveur, Manlius[52].

Par suite de l’invasion des Gaulois, la campagne avait été mal cultivée ; il en était résulté une disette. La misère des plébéiens était grande, et les patriciens ne faisaient rien pour la soulager. Ils avaient oublié ce noble élan qui avait entraîné la population tout entière au siège de Véies, et jamais les rigueurs de l’usure n’avaient été plus cruelles. Obligés eux-mêmes de refaire leurs fortunes que les désastres du siège avaient nécessairement amoindries, les patriciens redoublaient de dureté envers leurs débiteurs, dont les mêmes désastres avaient dû augmenter le nombre. Ils étaient rapaces comme les juifs du moyen âge et impitoyables comme Shylock. Parmi eus un seul homme beau, noble et riche, digne de son nom, qui voulait dire le bon (en sabin), avait pitié de ces misères du peuple ; c’était Manlius.

Un jour, dans le Forum, il vit un centurion que sa conduite militaire avait illustré, qui venait d’être condamné pour dettes et que l’on entraînait par ordre de son créancier dans la demeure de quelque patricien, destinée à devenir pour lui une affreuse prison. Manlius ne put supporter un tel spectacle : suivi de plusieurs plébéiens dévoués, il s’élança au milieu du Forum, mit la main sur cet homme en s’écriant : C’est en vain que cette main a délivré la citadelle et le temple de Jupiter, si je vois un citoyen romain, un compagnon d’armes réduit aux fers et à la servitude comme si les Gaulois l’avaient pris ![53] puis il acquitta en présence du peuple la dette du prisonnier.

Il fit plus : il vendit des terres qu’il avait dans le territoire de Véies ; elles devaient. être la récompense de son courage et faisaient la meilleure partie de son patrimoine. Tandis qu’on les mettait à l’encan dans le Forum : Citoyens, dit-il, tant qu’il me restera quelque chose à vendre, je ne souffrirai pas qu’un seul de vous soit condamné et livré ! Tite-Live ajoute a ces généreuses paroles d’autres paroles qui l’eussent été moins. Manlius accusa, dit-il, les patriciens d’avoir gardé pour eux l’or destiné à payer les Gaulois. Mais comme nous savons que cet or avait été bien réellement remis aux vainqueurs, nous devons voir dans cette calomnie prêtée à Manlius une calomnie des patriciens contre lui, que Tite-Live, toujours disposé à prendre leur parti, a répétée.

Appelé par les patriciens, le dictateur Camille quitte l’armée et accourt au sénat ; bientôt il sort delà Curie, se faisant suivre de tous les sénateurs qui prennent place dans le Comitium ; il y descend lui-même et y établit son tribunal, devant lequel il cite Manlius. Celui-ci arrive, suivi d’une grande multitude qui remplit le Forum. Le Comitium et le Forum, les sénateurs et les plébéiens sont en présence. C’étaient, dit Tite-Live (VI, 15), deux armées, dont chacune avait les yeux fixés sur son général ; deux armées, en effet, qui avaient été deux peuples.

Manlius répond avec audace au dictateur, et le dictateur ordonne qu’il soit conduit en prison. Il eut peu de chemin à faire pour s’y rendre, le Comitium touchait presque à la prison Mamertine. Manlius put y être entraîné sans avoir à traverser le Forum et avant que la foule qui le remplissait eût le temps de venir à son secours[54]. Seulement il leva les yeux vers le temple du Capitole, au pied duquel on l’arrêtait, et s’écria : Jupiter, Minerve, Junon, vous que j’ai délivrés et sauvés, m’abandonnerez-vous à mes ennemis !

Un grand nombre de plébéiens en habit de deuil vinrent à la porte de la prison[55] où Manlius était plongé dans les ténèbres, attendant le bourreau[56], et pendant ce temps le temple sacré qu’il avait défendu étincelait au soleil au-dessus de sa tête.

Le peuple voulait briser les portes du cachot de Manlius ; le sénat effrayé le relâcha. Manlius remonta dans la citadelle, où était sa maison, le cœur plein de colère et respirant la vengeance.

Tite-Live lui fait tenir dans cette maison des conciliabules où se prépare une révolution et prononcer à la tribune des discours séditieux, mais n’énonce aucun acte criminel ; il prête aussi à Manlius le projet de se faire roi, lieu commun ridicule des accusations patriciennes, mais il avoue qu’on n’a jamais su ni avec qui, ni dans quelle intention ce prétendu conspirateur avait conspiré[57].

Décidé à le trouver coupable, le sénat lui faisait un grief du lieu de son habitation, qui était dans la citadelle et qui, par sa position, menaçait la liberté[58]. Mais d’autres patriciens avaient demeuré sur le Capitole et pour cette raison avaient porté, comme Manlius, le nom de Capitolinus[59].

Deux tribuns gagnés par le sénat, ou jaloux de la popularité de l’aristocrate, offrirent de l’accuser, et sa noble famille l’abandonna ; personne dans cette famille ne prit des vêtements de deuil, selon l’usage, le jour où il parut devant les centuries assemblées dans le champ de Mars. On comptait, pour. le faire condamner, sur, le jugement des centuries où les plébéiens dominaient ; car on était parvenu à leur faire croire que Manlius voulait se faire roi.

Cependant la gloire de Manlius faillit le sauver. D’abord il fit comparaître dans le Champ de Mars quatre cents citoyens qu’il avait défendus de la ruine et de la prison, et auxquels il avait avancé de l’argent sans intérêt, libéralité de mauvais exemple que les patriciens étaient bien aises de décourager : puis il montra les dépouilles des ennemis tués de sa main, au nombre de trente, les récompenses militaires qu’il avait reçues, au nombre de quarante, parmi lesquelles deux couronnes murales et huit couronnes civiques. Il produisit les citoyens romains qu’il avait arrachés à l’ennemi ; l’un d’eux, qu’il ne put présenter mais qu’il nomma, était Servilius Ahala, maître de la cavalerie et son ennemi acharné. Puis après avoir dit tout ce qu’il avait fait pour sa patrie, il découvrit sa poitrine couverte de cicatrices et se tournant vers le Capitole[60], il invoqua Jupiter et les autres divinités qui y étaient honorées, leur demandant devenir en aide à sa fortune et de mettre dans l’âme des Romains les sentiments qu’ils avaient placés dans l’âme de Manlius quand il sauvait Rome ; enfin il pria les citoyens de regarder la citadelle et le Capitole avant de le juger.

Les tribuns comprirent que le peuple, tant qu’il verrait le Capitole, ne pourrait condamner Manlius. L’affaire fut remise à un autre jour et la scène du jugement transportée dans un autre endroit, dans le bois Pætelinus, près de la porte Flumentane[61]. Là, Manlius n’ayant plus pour le protéger le glorieux témoin qu’il avait invoque, une sentence de mort fut portée contre lui.

Il y avait encore une autre raison pour qu’il en fût ainsi. Au jugement des comices par centuries qui représentaient l’universalité des citoyens, et particulièrement depuis la réforme démocratique de ces comices, la partie plébéienne de la cité, on substitua le jugement des Curies patriciennes[62] ; c’était livrer Manlius à ses ennemis.

La nature de ce jugement par curies fait craindre que le récit d’après lequel Manlius aurait péri sous les verges du bourreau[63] dans le Comitium[64], ne soit le véritable, car c’était le supplice de celui que le sénat avait déclaré ennemi de la patrie[65].

Espérons que la tradition généralement reçue est la plus vraie, et laissons à la mémoire de Manlius cette triste gloire qu’il ait été précipité de la roche Tarpéienne, sur laquelle s’élevait la citadelle qu’il avait sauvée.

Ce genre de mort était lui-même infamant, car c’est de la roche Tarpéienne qu’on précipitait les esclaves[66].

Après sa mort sa maison fut rasée et on décida que désormais nul patricien n’habiterait sur le Capitole.

Ainsi toute la destinée de Manlius est attachée au Capitole, dont il portait le nom, où il était né, d’où il avait précipité les Gaulois et d’où il devait être précipité à son tour[67].

Si l’on en croyait une version différente de sa mort[68], le Capitole aurait joué encore un autre rôle dans la destinée de Manlius.

Il se serait emparé par la force du mont Capitolin, les patriciens effrayés auraient envoyé vers lui un traître, un esclave qui, se présentant comme venant de la part des esclaves prêts à se soulever et feignant de vouloir lui confier un secret, l’aurait conduit au bord de la roche Tarpéienne et l’en aurait fait tomber[69].

Sans adopter ce récit invraisemblable, quand le Capitole n’aurait pas d’autre histoire à raconter que la destinée de Manlius, la destinée de Manlius en ferait toujours le lieu le plus dramatique de la terre.

La haine des patriciens poursuivit Manlius après sa mort sur le théâtre même de sa gloire ; on rasa sa maison, et il fut interdit dès lors à tout patricien d’habiter sur lé Capitole ; personne dans la gens Manlia ne porta plus le prénom de celui qui l’avait illustrée.

Le vieux Camille, qu’on trouve avec regret à la tète du parti qui, fit mourir Manlius ; allait reparaître encore une fois sur la scène. Le sénat fut le chercher pour opposer sa dictature, comme un dernier secoua,, au triomphe qui semblait assuré des lois Liciniennes : Ces lois, proposées par les tribuns Licinius, Stolo et L. Sestius, étaient le plus grand effort démocratique tenté jusqu’à ce jour. La première avait pour but d’alléger les dettes des plébéiens ; la seconde, de limiter la quantité de terres publiques dont il serait permis à un citoyen de conserver la possession ; la troisième, de faire admettre les plébéiens aux honneurs consulaires. Les patriciens, attaqués dans leur avarice et leur orgueil, résistaient opiniâtrement ; près d’être vaincus, ils appelèrent Camille.

Il avait près de quatre-vingts ans quand il vint livrer à la démocratie un dernier combat ; lie combat fut terrible. Camille voulut interrompre violemment les comices par tribus[70] ; il ordonna aux plébéiens de quitter le Forum et de se rendre sous les armes au champ de Mars. Les plébéiens refusèrent, et Camille abdiqua la dictature. Bientôt après elle lui fut rendue ; mais les tribuns en étaient venus à pouvoir tout oser, et comme Camille haranguait à la tribune, l’un d’eux donna l’ordre de l’arrêter[71] ; le serviteur du tribunat mit la main sur le dictateur octogénaire. Alors ce fut dans le Forum un tumulte comme on n’en avait jamais vu ; ceux qui entouraient Camille repoussaient la foule de la tribune qu’elle voulait envahir ; la foule qui était au-dessous criait qu’il fallait saisir Camille. Celui-ci descendit de la tribune et se réfugia dans le Comitium. S’arrêtant à son entrée et se tournant vers le temple de Jupiter, toujours fidèle à son caractère religieux, il pria les dieux du Capitole de tout diriger pour le mieux,, et voua un temple à la Concorde si ces troubles s’apaisaient. L’agitation fut grande dans le Comitium, mais le parti le plus modéré l’emporta, et l’on convint d’accorder qu’un des deux consuls serait plébéien. Le sénat ratifia cette importante concession, et Camille ayant reparu à la tribune pour l’annoncer au peuple, il fut accompagné jusque chez lui parles applaudissements et les acclamations de la multitude. Telle est l’origine du premier temple de la Concorde élevé pour cimenter l’accord des patriciens et des plébéiens, qui fui en réalité le triomphe de ceux-ci, et devait être bientôt détruit par des luttes nouvelles. C’est au temps du siège de Véies qu’il aurait fallu dédier un temple à la Concorde.

Ce temple s’élevait sur le mont Capitolin, — vers lequel Camille s’était tourné en faisant sa prière, — regardant le Forum et le Comitium, au pied des degrés nombreux qui conduisaient au temple de Juno Moneta[72] ; ces degrés sont assez exactement représentés aujourd’hui par les marches qui conduisent de la place du Capitole à la roche Tarpéienne, et la situation du temple indiquée au sommet de la rampe actuelle par où  on descend au Campo Vaccino[73] et d’où on a une si belle vue du Forum ; c’est de là qu’au dire d’Ovidé la déesse le contemplait rempli par la foule.

Nunc bene prospicies latiam, concordia, turbam.

C’est de là que nous le contemplons vide.

 

 

 



[1] Diodore, XIV, 114.

[2] Quelques années plus tard, les Romains réhabilitèrent un peu ce nom en battant les Prénestins près de l’Allia. (Tite-Live, VI, 29.)

[3] Diodore de Sicile (XIV, 114) dit soixante-dix mille.

[4] Paulum erat ab dextra editi loci. (Tite-Live, V, 38.)

[5] Nibby (Dint., I, p. 125) le place aux environs de Torre San Giovanni. C’est pour retrouver l’Allia dans le Fosso della Conca, qui passe à Mal Passo. Mais alors la bataille n’aurait pas eu lieu au bord du Tibre.

[6] Appien, Bell. Gall., Fragm.

[7] Tite-Live, V, 39.

[8] Tite-Live, V, 41. Tite-Live dit : Pro patria Quiritibusque Romanis. S’il a, comme c’est possible, conservé la formule de la consécration, on peut remarquer cette expression : Quiritibus Romanis, les Sabins de Rome. C’est pour les Sabins de Rome que voulait mourir l’aristocratie sabine.

[9] Cære, autrefois la pélasgique Agylla, était un asile convenable pour le culte de Vesta, qui remontait aux Pélasges.

Selon Plutarque (Camille, 20), on déposa une partie des choses sacrées au Capitole ; le reste fut placé dans des tonneaux, c’est-à-dire de grands vases de terre, qu’on enfouit sous le temple de Quirinus, dans un lieu qui, pour cette raison, s’appela toujours Doliola, et où  il n’était pas permis de cracher (P. Diacre, p. 69) ; ce lieu, indiqué par Plutarque dans le temple de Quirinus, et par Tite-Live (V, 40) Sacello proximo ædibus flaminis Quirinalis, devait être voisin du Comitium, s’il n’était dans le Comitium même, où une tradition voulait qu’on eût déposé autrefois dans un mundus d’autres objets sacrés ; il ne faut pas chercher les Doliola près de l’embouchure de la Cloaca Maxima dans le Tibre, parce que Varron (De Ling. lat., V, 157) dit qu’ils étaient ad Cloacam Maximam. La Cloaca Maxima, qui recueillait les eaux de l’Esquilin et communiquait avec les égouts de la Subura, passait près du temple de Quirinus.

[10] Via quæ Sublicio ponte ducit ad Janiculum... in eo clivo. (Tite-Live, V, 40.) Une inscription trouvée dans le Forum d’Auguste, et qui se conserve au musée du Vatican, fait allusion à cet événement. (Schwegler, II, p. 250-1.)

[11] Plutarque (Camille, 22) dit que ces vieillards s’étaient réunis dans l’Agora, ce qui veut dire ici le Comitium.

[12] Il faut encore faire honneur de ce beau trait à l’énergie sabine. Les Papirii ou Papisii étaient Sabins. Celui qui frappa le Gaulois s’appelait Papirius Manius (Plutarque, Camille, 22), de manus, bon, en sabin. Les Papirii avaient des surnoms en o, Carbo, Maso. Leur nom ressemble à celui des Papii ; Papius est un nom samnite.

[13] Tout fut brûlé, excepté quelques maisons sur le Palatin, parce que les chefs des Gaulois y avaient établi leur demeure.

[14] Les Romains avaient de l’eau. Niebuhr croit les puits qu’on reconnaît encore dans l’intérieur du Capitole aussi anciens que l’occupation des Gaulois ; plus tard, on n’eût pas eu besoin de les creuser.

[15] Medio fere clivo resistere. (Tite-Live, V, 45.) Un peu au-dessus du temple de Saturne. Les Gaulois, pour arriver à la citadelle, avaient besoin de s’emparer d’abord de la plate-forme située entre les deux sommets capitolins (la place du Capitole). On voit que toute la colline avait été mise en état de défense.

[16] Tuscorum ad salinas profecti. (Tite-Live, V, 45.) Ces salines étrusques devaient être sur la rive droite du Tibre, comme les salines romaines étaient sur la rive gauche.

[17] Tite-Live, V, 46.

[18] Encore un nom sabin, car il est sabellique. Pontius Herennius et Pontius Telesinus sont des Samnites célèbres. Il y a un Pontius Pelignus et un Pontius Sabinus. Un Pontilius figure parmi les chefs des confédérés dans la guerre sociale. Enfin on trouve aussi un Cominius Auruneus.

[19] Plutarque, Fort. Rom., 12.

[20] Elles purent la voter au Capitule sans manquer aux usages reçus, car les comices par curies se tenaient parfois sur le Capitole devant la curia Calabra.

[21] Animadverso ad Carmentis saxorum ascensu æquo... (Tite-Live, V, 47.)

[22] Schwegler suppose que les oies étaient dans le temple de Junon, qui formait une des trois cellas du temple de Jupiter, et cite Denys d’Halicarnasse ; mais Denys ne le dit point, et l’expression qu’il emploie, τέμενος, ne s’applique pas bien à une cella.

[23] D’après un autre récit (Cicéron, Pro Cæc., 30 ; Philip., III, 8), les Gaulois seraient arrivés au Capitole par un conduit souterrain ; ce serait un de ces conduits dont la colline est traversée.

[24] Selon le témoignage de Tite-Live (VI, 20 ; VII, 28) et de Plutarque (Camille, 50), le temple de Junon Moneta ne fut élevé que postérieurement sur l’emplacement de la maison de Manlius ; mais le récit de la tentative des Gaulois montre un temple de Junon existant dès lors près de la demeure de Manlius, puisqu’il fut réveillé par le cri des oies de Junon. Je pense que ce fut ce temple que l’on consacra plus tard à Junon qui avertit. Il n’est pas rare que la consécration d’un temple soit confondue avec sa fondation. On peut le remarquer pour les temples de Saturne, de Castor et de Vesta. Le temple de Junon était sur la citadelle (Ovide, Fastes, VI, 183), comme la demeure de Manlius. De grandes substructions que j’ai vues dans le jardin Caffarelli sont probablement les substructions du temple de Junon Moneta.

[25] Le mot monnaie (moneta) vient de ce qu’on plaça la Monnaie près du temple de Junon Moneta. (Tite-Live, VI, 20.)

[26] Servius, Æn., VIII, 652. Auratis porticibus. C’était bien probablement les portiques du temple de Junon. Virgile a fait allusion à cette oie d’argent :

... Auratis volitans argenteus anser

Porticibus.

Æn., ibid.

On montre aujourd’hui au Capitole de prétendues oies en bronze qui sont des canards.

[27] Pline, Hist. nat., XXIX, 14, 1 ; Plutarque, Fort. Rom., 12.

[28] On m’a raconté l’histoire d’un paysan avare qui avait caché de l’argent dans tous les coins de sa maison. Il y vivait seul avec des oies, disant que pour avertir au moindre bruit, elles étaient très préférables aux chiens.

[29] Ovide, Fastes, VI, 396.

[30] Veget., R. mil., IV, 9.

[31] A propos de la défense de Carthage, de Byzance, d’Aquila, de Thasos.

[32] Les auteurs ne sont pas d’accord sur la durée du siège, ils varient de six à huit mois. Comme en octobre le climat romain redevient salubre, il est probable que les Gaulois n’attendirent pas jusqu’à cette époque de l’année, qui leur aurait rendu la santé et le courage, et qu’ils se retirèrent avant la fin de septembre, c’est-à-dire au bout de deux mois.

[33] Tite-Live, V, 48, XXII, 14. Les Gaulois campaient dans le Forum pour surveiller le seul côté du Capitole par où ils pouvaient craindre que les Romains ne fissent une sortie. Varron (Ling. lat., V, 157) explique les mots Busta gallica, d’une autre manière : c’est là, dit-il, qu’après être rentrés en possession de Rome, les Romains brûlèrent les ossements des Gaulois. Quoi qu’il en soit la mention qu’il fait des busta gallica m’est précieuse, parce qu’elle vient à l’appui de ma conjecture sur leur emplacement et celui des doliola, deux points, dont la situation n’a pas été bien déterminée. En effet, Varron nomme les busta gallica après l’Æquimælium (au bas de la roche Tarpéienne) et avant les doliola voisins du temple de Quirinus ; ils étaient donc probablement vers la partie sud-ouest du Forum, à une extrémité du camp des Gaulois. Ce qui a empêché de croire que l’ordre indiqué par Varron l’ut le véritable, c’est parce qu’on voulait que les doliola fussent près de la portion de la Cloaca Maxima que connaissent les voyageurs, tandis qu’ils étaient voisins de celle qui traversait le Forum. On ne la voyait pas à la surface du sol, mais en creusant le trou dans lequel on voulait enfouir les doliola on l’avait rencontrée. De plus, Tite-Live (XX, 14) dit que les busta gallica étaient au milieu de la ville, expression toujours employée pour désigner les environs du Forum. Car on la trouve appliquée au Milliarium aureum qui existe encore en partie vers l’extrémité du Forum, au mont Palatin, qui le domine, aux Carines qui l’avoisinaient.

[34] Infanda merces, Tite-Live, V, 49.

[35] Justin, XXVIII, 4. Nec bello hostem sed pretio remotum. (Tacite, Hist., III, 72 ; Diodore Sic., XIV, 116.

[36] Selon Diodore de Sicile (XIV, 117), en Étrurie ; suivant Servius (Æn., VI, 826), en Ombrie.

[37] Festus, p. 372.

[38] Tite-Live, V, 52.

[39] Idem, ibid., 55.

[40] Romam... non optimis viis, angustissimis semitis. (Cicéron, Leg. agr., II, 35.)

[41] Juvénal, Satires, III, 236.

[42] Il permit à chacun, à condition qu’il aurait rebâti sa maison dans un an, de prendre la pierre et le bois où il voudrait, et fournit les tuiles (Tite-Live, V, 55). Probablement on emprunta beaucoup de matériaux de construction à Véies, presque déserte encore au temps de Properce.

[43] Promiscue urbs ædificari cæpta (Tite-Live, V, 55.)

[44] Festinatio curam exemit vicos dirigendi (ib.), όδούς στενάς γενέσθαι xαί xαμπάς έχούσας (Diodore Sic., XIV, 116), arctis itineribus hucque et illuc flexis, atque enormibus vicis. (Tacite, Ann., XV, 38.)

[45]  (Urbs) passim erecta (Tacite, Ann., XV, 43).

[46] Stantibus templis deorum, disait Camille (Tite-Live, V, 53). La preuve qu’il disait vrai, c’est qu’un assez grand nombre de temples et d’édifices publics, la Curia Hostilia par exemple, construits antérieurement à l’incendie des Gaulois, existaient encore après cet incendie. Pour la même raison, on ne peut admettre que les Gaulois, dans leur court séjour, aient détruit les murs, quoi qu’en dise Plutarque. (Camille, 32.)

[47] Tite-Live, VI, 5.

[48] Recta fronte Capenam portam (Scholiaste, Ovide, Fastes, VI, 193). Le scholiaste ajoute : Et est appositum extra ad viam tectam ; ce que dit aussi Ovide :

... Quem prospicit extra

Appositum tectæ porta Capena viæ.

[49] Ce portique allait de l’église de Saint-Nérée et Achillée jusqu’à un aqueduc voisin de la porte Capène (ad formam. Beck. Handb., p. 513). Ce témoignage de l’anonyme d’Einsiedlen s’accorde très bien avec celui d’Ovide dans les vers cités plus haut et avec celui de Properce (IV, 3, 71), qui désigne poétiquement le temple de Mars par la porte Capène. Mais d’autres témoignages non moins positifs placent le temple de Mars a plus d’un mille de la porte ad Martis entra milliarium, I et II ab urbe euntibus parte læva, inscription citée par Urlich (Rom. top., p. 908) ; ce qui nous apprend aussi que le temple était sur la gauche de ceux qui sortaient de Rome. Appien (Bell. Civ., III, 41), parle d’un temple de Mars à quinze stades de Rome (prés de deux milles). C’est à ce temple que se rapporte l’inscription trouvée à un mille environ de la porte Capène (Beck., Handb., p. 512), et dans laquelle l’aplanissement de la montée de Mars est mentionné. Les travaux du chemin de fer viennent de confirmer la vérité de ce renseignement. En présence d’indications si précises et si contradictoires, je ne vois d’autre parti à prendre que de faire comme a fait Becker, de supposer qu’il y a eu de ce côté deux temples de Mars, l’un tout près de la porte Capène, et l’autre à un mille environ plus loin. On expliquerait ainsi comment le temple de l’Honneur et de la Vertu a pu être confondu avec un temple de Mars, ainsi que Becker l’a remarqué, et comment, d’autre part, ce qu’il n’a point dit, le temple de l’Honneur et de la Vertu est le premier des monuments énumérés par le Curiosum et la Notitia dans la région de la porte Capène, et le temple de Mars un des derniers. La confusion a eu lieu entre le temple de l’Honneur et de la Vertu, qui était situé près de la porte Capène, et celui des deux temples de Mars qui en était très rapproché ; le temple de gars qui était à plus d’un mille de cette porte est celui qu’indiquent les régionaires.

[50] Capitolium se prenait comme Tarpeius mons, tantôt pour une des deux parties, tantôt, comme ici, pour tout l’ensemble du mont Capitolin.

[51] Histoires naturelles, XXXV, 24, 5.

[52] Nom certainement sabin ; la racine est manus, bon, d’où les Manii d’Aricie. Man-lius pour mani-filius. De là aussi le nom des Manilii et Mamilii. Ces noms sont mis souvent les uns pour les autres aussi bien que Maliii, qui semble en être une contraction. Vulso, surnom sabin en o et dénomination d’un peuple sabellique, est un surnom des Manlii. Plusieurs d’entre eux se sont appelés Titus Manlius ; Titus est un prénom sabin.

[53] Tite-Live, VI, 14.

[54] Cette circonstance topographique rend raison de ce qui est difficile à comprendre dans le récit de Tite-Live : que la multitude qui avait accompagné Manlius ne lui ait pas donné signe de sympathie au moment de son arrestation.

[55] C’est, je crois, le sens : Obversatamque vestibulo carceris mæstam turbam. (Tite-Live, VI, 15.)

[56] Tite-Live, VI, 17.

[57] Idem, ibid., 18.

[58] Idem, ibid., 19.

[59] On cite des Quinctii, des Servilii, des Tarpeii. Ceux-ci devaient avoir, comme Manlius, habité dans la citadelle sur la roche Tarpéienne. C’est parce que Manlius y avait sa maison que lui et plusieurs personnes de sa famille portèrent ce surnom. Un autre Manlius (Tite-Live, IV, 42), l’avait porté avant lui. II ne lui fut donc pas donné après son exploit du Capitole, comme l’a dit è tort, et comme on le croit d’ordinaire. Il n’y avait que des patriciens sur le Capitole ; si un Mælius, plébéien, — Sp. Mælius était un chevalier des centuries plébéiennes, — porta le surnom de Capitolinus, c’est que la demeure des Mælius était dans le vicus Jugarius au bas du mont Capitolin.

[60] La scène devait se passer dans les Septa, lieu alors découvert, d’où l’on ne saurait noir aujourd’hui le Capitole, parce que cette partie de l’ancien Champ de Mars est bâtie ; mais au temps de Manlius il n’y avait pas de maisons dans le champ de Mars, où il n’était pas permis d’en construire. La plupart des édifices publics qui s’y élevèrent depuis, et entre autres le cirque Flaminien, voisin des Septa, n’existaient pas encore. Du lieu où Manlius parlait on pouvait donc voir parfaitement la citadelle et le temple de Jupiter, qui devait faire à peu près l’effet que produit le palais de Paul II sur le Capitole, aperçu de la place San-Marco.

[61] Tite-Live, VI, 20. La porte Flumentane, comme son nom l’indique, était au bord du fleuve, et dans un lieu exposé aux inondations (Tite-Live, XXXV, 9, 21 ; P. Diacre, p. 89) ; on ne peut donc la placer qu’au-dessous de la porte Carmentale, vers l’extrémité du Vélabre, lieu, en effet, facilement inondé. C’était en dehors de cette porte, dans le champ de Mars, que se tinrent les comices par curies, dans lesquels Manlius fut condamné. Tite-Live (VII, 41) cite une autre cause jugée par les curies dans le bois Pætelinus. Des environs de la porte Flumentane on ne pouvait apercevoir le temple de Jupiter, et on ne pouvait pas bien voir la citadelle, si, comme je le crois, elle occupait la partie de la roche Tarpéienne la plus éloignée. D’ailleurs, comme l’a très judicieusement remarqué Bunsen, les arbres d’un bois empêchent de voir. On a proposé de lire dans Tite-Live porta Nomentana, au lieu de porta Flamentana, ce qui est contraire à la leçon des bons manuscrits et à l’usage constant de tenir les assemblées dans la région du champ de Mars ou du Forum. D’ailleurs, il n’y a eu de porte Nomentane que dans l’enceinte d’Aurélien. Ce qui pourrait faire croire que Tite-Live aurait appelé porte Nomentane la porte Colline, parce qu’elle conduisait à Nomentum, expression du reste tout à fait insolite, c’est qu’il y avait près du Cispius un lucus Pætelius (Varron, De ling. lat., V, 50), mais ce nom a pu être donné à deux bois sacrés. Ce qui se conçoit facilement si ce nom remontait aux Pélasges, petalon voulant dire feuille en grec. Pætelinus aurait été le nom d’un bois touffu, circonstance favorable au dessein des patriciens en s’y rassemblant pour juger Manlius. Les noms de Pétélie ou Pétilie, ville du Brutium dont on attribuait la fondation à Diomède, ce qui semble indiquer une provenance pélasgique, et de Petalia, en Grèce, peuvent avoir la même origine.

[62] Cette remarque de Schwegler (III, p. 280) s’appuie sur une phrase de Tite-Live (VI, 20), qui oppose le concilium populi aux assemblées des centuries. Je la crois fondée, mais ce n’était pas une raison pour nier la belle tradition que l’histoire consacre.

[63] Selon Cornelius Nepos, cité par Aulu-Gelle (Noct. Att., XVII, 21).

[64] Si Manlius fut mis à mort ainsi, ce fut probablement dans le Comitium, car c’était là que ce genre de supplice était infligé à celui qui avait séduit une vestale.

[65] On le voit dans la vie de Néron, par Suétone (49).

[66] Aulu-Gelle, Noct. Att., XI, 18.

[67] Une raison de plus de placer la roche Tarpéienne là où elle était véritablement, c’est que si on la plaçait à Araceli, les condamnés fussent tombés dans les environs du Vulcanal et du Comitium dont un tel spectacle eût souillé les approches : Denys d’Halicarnasse (VII, 35 ; VIII, 78), dit bien que Sp. Cassius fut précipité d’un rocher qui dominait le Forum ; à la vue de tous, mais ces expressions peuvent s’appliquer à la partie de monte Caprino, qui est la plus rapprochée du Forum. Plus loin, on montre aux voyageurs un rocher qui est à découvert, leur disant : C’est la roche Tarpéienne, et les voyageurs s’étonnent du peu de hauteur de ce rocher, ne réfléchissant pas que le rocher que leur indiquent sans nul motif les ciceroni n’est qu’une petite partie de la roche Tarpéienne. On donnait ce nom au sommet méridional tout entier. J’habite sur ce sommet, et je comprends très bien ce qui m’arriverait si on me jetait par ma fenêtre dans la rue de la Consolazione. Ce serait une chute d’une centaine de pieds. De plus, le flanc de la roche Tarpéienne était hérissé de saillies contre lesquelles se heurtait et se brisait avant d’arriver en bas le corps de ceux qui en étaient précipités. Frequentibus exasperata saxis quæ aut elidant corpus aut de integro gravius impellant (Sénèque, Controv., 3). Immensæ attitudinis tristis aspeclus. (Ibid.)

[68] Zonaras (VII, 24) d’après Dion Cassius.

[69] Manlius ne se serait pas tué en tombant, et les deux jugements auraient en lieu après sa chute ; ceci est absurde.

[70] Tite-Live, VI, 38.

[71] Plutarque, Camille, 42.

[72] Ovide, Fastes, I, 637.

[73] On ne peut le mettre qu’au sud de l’espace occupé par le Tabularium ; il était à droite de la voie Triomphale, que coupe la rampe moderne en un point au delà duquel elle se prolongeait vers le sud pour revenir vers le nord et atteindre l’Intermontium (la place du Capitole). On croit généralement que le temple de la Concorde, dont remplacement n’est pas méconnaissable, au pied du Capitole et au-dessus du Forum, était le temple voué par Camille. Les vers d’Ovide prouvent que le temple dédié à la Concorde par le vieux’ dictateur n’était pas là, mais sur le Capitole, puisqu’il se trouvait au pied des degrés qui conduisaient au temple de Junon Monta, élevé dans la citadelle et par conséquent sur la roche Tarpéienne. C’est celui-ci qui fut refait plus lard et dédié par Tibère ; il n’en reste rien. L’autre, celui du Forum, dont on admire de si beaux débris dans le Tabulsrium et dans le musée Capitolin, a remplacé un des deux petits temples de la Concordé bâtis sur le Vulcanal avant la fin de la république. On ne sait quand et à quelle occasion il a été construit.