Jacques Nicolas Augustin Thierry
(10 mai 1795, Blois - 22 mai 1856, Paris). Né à Blois, frère aîné d'Amédée
Simon Dominique Thierry, il n'a pas l'avantage de la naissance ou de la
fortune, mais il se révèle vite extrêmement doué. Il récolte de nombreux
prix et se distingue au lycée de Blois, ce qui lui permet d'entrer à l'École
normale supérieure en octobre 1811. En deux ans, il décroche le baccalauréat
ès lettres, le baccalauréat ès sciences et la licence de lettres. Il quitte
l'ENS en 1813, envoyé comme professeur à Compiègne pour y enseigner les
humanités. Il y séjourne peu de temps et revient rapidement à Paris.
Sa nature ardente et généreuse l'a conduit à embrasser les idées de la
Révolution française avec enthousiasme. Il se rapproche alors de la vision
idéale de la société de Saint-Simon qui lui demande son aide, puis dont il
devient le secrétaire entre 1814 et 1817 et, comme il le disait lui-même,
son fils adoptif. Mais, pendant que la plupart des disciples de Saint-Simon
s'occupaient des affaires de la vie, des problèmes théoriques et pratiques,
Thierry décida de porter son attention sur l'histoire.
Sa vocation d'historien a été fortement influencée par la lecture des
Martyrs de Chateaubriand. Son ardeur romantique a été plus tard nourrie par
les écrits de Walter Scott, et même s'il n'écrivait pas de récits de
fiction, sa conception de l'histoire intégrait son aspect littéraire et
dramatique.
En 1817, Augustin Thierry entre au journal Le Censeur (qui devient ensuite
le Censeur Européen) et se lance dans le combat libéral en fournissant un
article par semaine dès 1819, ses écrits essayant de trouver dans l'histoire
les arguments nécessaires à la réfutation de la politique contemporaine. Son
idée directrice sur les invasions barbares, la conquête normande, la
formation des communes, l'ascension progressive des nations vers le
gouvernement libre et les institutions parlementaires s'observent déjà dans
ces articles. Une fois le Censeur Européen disparu en 1820, c'est dans ses
Lettres sur l'histoire de France publiées dans le Courrier Français en 1820
qu'il expose les principes de la « réforme historique » qu'il souhaite
inscrire dans son siècle, mais les critiques virulentes soulevées par ses
écrits le font quitter le Courrier Français en janvier 1821.
Grâce à Fauriel, il a appris à utiliser les sources originales et cherche à
faire l'histoire afin de la comprendre et non plus pour ses aspects
subjectifs. Grâce à l'aide de chroniques latines et de la collection des
lois anglo-saxonnes jusque là très mal comprises, il a fait paraître en 1825
son Histoire de la conquête de l'Angleterre par les Normands dont la
parution souleva l'enthousiasme.
Écrite dans un style à la fois précis et romanesque, elle est dominée par
l'idée fausse suivant laquelle la liberté anglo-saxonne a résisté à
l'invasion normande a survécu malgré la défaite à travers la monarchie
parlementaire. Son talent d'écrivain rend les approximations et les manques
de son travail moins visibles. Cet ouvrage, publié à l'issue de nombreuses
années de travail acharné, a entraîné pour Augustin Thierry de graves
problèmes de vue. En 1826, il se trouve dans l'obligation d'engager des
secrétaires pour l'assister, et quelques années plus tard, il est
quasi-aveugle. Pourtant, il continue son œuvre.
En 1827 il publie à nouveau ses Lettres sur l'histoire de France, avec
quinze nouvelles additions dans laquelle il décrit les épisodes les plus
frappants de l'apparition des communes médiévales. Les chroniques des XIe et
XIIe siècles ainsi que quelques chartes communales lui ont fourni les bases
d'un édifice solide. C'est pour cette raison que son travail sur les
communes n'est pas aussi daté que sa conquête normande, mais il était trop
vif à généraliser les faits fournis par quelques cas mémorables mais
localisés. Ceci a favorisé la transmission au public, et même à certains
historiens de profession des idées fausses sur l'un des problèmes les plus
complexes des origines sociales françaises.
En 1828, son état de santé devient préoccupant : il est atteint d'un tabès
dorsal qui le paralyse. Immobilisé et aveugle, il est accueilli par la
famille d'Espine. Cette période lui permet de lier une amitié épistolaire
avec Chateaubriand.
Thierry fut un ardent partisan de la Révolution de Juillet qui porta ses
amis au pouvoir. Guizot lui octroie une pension et nomme son frère Amédée
préfet de Haute-Saône. Ce dernier l'invite à passer quelques temps chez lui
pour se reposer : il arrive à Vesoul le 22 avril 1831. Il passe quatre ans
dans la région, rencontrant Julie de Querengal qu'il épouse le 7 novembre de
la même année et qui devient sa plus proche collaboratrice.
En 1834, il réédite sous le nom Dix ans d'études historiques ses premiers
essais parus dans le Censeur européen et le Courrier français. Il publie
également ses Récits des temps mérovingiens (le premier d'entre eux sort en
1833) dans lequel il reproduit sous une forme vivante et dramatique quelques
uns des récits les plus célèbres de Grégoire de Tours. Ces Récits sont parus
tout d'abord dans la Revue des deux mondes, puis regroupés en volumes
précédés de la très pertinente introduction Considérations sur l'histoire de
France où il exprime sa philosophie politique. Ces récits furent illustrés
par le peintre Jean-Paul Laurens.
Déjà membre de l'Académie des inscriptions et belles-lettres depuis le 7 mai
1830, cette publication lui vaut de recevoir en 1841 le Prix Gobert à vie,
de la part de l'Académie française. Le duc d'Orléans lui offre même la
direction de sa bibliothèque en 1835. Son protecteur Guizot lui confie la
direction de grandes publications de documents historiques dont il tire un
Essai sur le Tiers état en 1850. Il a été également chargé de publier les
Documents inédits, une sélection d'actes jalonnant l'histoire du Tiers état.
Avec tout un réseau de collaborateurs zélés tels que Charles Bourquelot,
Charles Louandre, Ernest Renan, il compile ces documents dans le Recueil des
monuments inédits de l'histoire du Tiers état (1850-1870), qui ne porte
cependant que sur la partie septentrionale de la France. Sa préface à cet
ouvrage a ensuite été publiée séparément sous le nom Histoire du Tiers état.
On doit à Augustin Thierry la première étude critique des institutions
communales, et peu de choses peuvent expliquer le relatif oubli dont il a
été l'objet après sa mort. La fin de sa vie a été assombrie par des
problèmes personnels et des soucis de santé. Il perd sa femme Julie de
Querengal le 9 juin 1844, une femme intelligente qui avait été pour lui une
collaboratrice aussi capable que dévouée. La Révolution de 1848 lui infligea
un dernier coup en ruinant son interprétation de l'histoire nationale basée
sur la concorde et en lui coupant une bonne partie des rentes attribuées par
Guizot. Il ne dissimule pas son désarroi en constatant le renversement du
régime de la bourgeoisie libérale qu'il avait posé en épilogue inéluctable à
l'histoire de France.
Il a alors commencé à se détacher des opinions rationalistes et à se
rapprocher de l'Église. Quand les auteurs catholiques lui ont reproché ses
erreurs historiques, il promit de les corriger, et on ne retrouve plus dans
sa dernière édition de l'Histoire de la conquête ses sévères jugements sur
la politique de Rome. Sans renoncer à ses amis libéraux, il a cherché la
compagnie de prêtres éclairés, et, juste avant sa mort, il a semblé disposé
à rejoindre l'Église.
Augustin Thierry est mort à Paris à l'âge de 61 ans, après avoir connu une
fin de vie difficile.
Sa
biographie sur Wikipédia.
Amédée
Simon Dominique Thierry, né le 2 août 1797 à Blois et mort le 27
mars 1873 à Paris, était un journaliste et historien français.
Jeune frère d'Augustin Thierry, il commence sa vie active comme journaliste
après un essai, comme son frère, de maître d'école. Il entre en relation
avec le célèbre journal romantique d'avant-garde Le Globe et obtient un
petit poste de fonctionnaire. Son premier ouvrage, en 1825, est une brève
histoire de Guyenne et trois ans plus tard, paraît le premier volume d'une
Histoire des Gaulois qui
est accueilli très favorablement et lui permet d'obtenir, de la part du
président du conseil royaliste Martignac, une chaire d'histoire à Besançon.
Toutefois, il est jugé trop libéral par le gouvernement de Charles X et son
enseignement est arrêté avec le résultat de lui assurer, après la Révolution
de 1830, le poste de préfet de la Haute-Saône qu'il assumera pendant huit
ans.
Il ne publiera rien pendant cette période. En 1838, il est nommé maître des
requêtes au Conseil d'État, poste qu'il conservera, par delà la Révolution
de 1848 et le Coup d'État de 1851, jusqu'en 1860, date à laquelle il sera
fait sénateur (un poste rémunéré et, en fait, une lucrative sinécure). Il
gravit tous les échelons dans la Légion d'honneur, devint membre de
l'Académie des inscriptions et belles-lettres en 1841 et, en 1862, reçoit le
grade honoraire de D.C.L. (Doctor of Civil Law) à l'Université d'Oxford. À
l'exception de la période où il fut préfet, il n'arrêta pas sa production
littéraire, resta un contributeur constant de la Revue des deux mondes, ses
articles, usuellement retravaillés par la suite à destination d'ouvrages,
ayant essentiellement trait à la Gaule romaine et son époque.
Son fils, Gilbert Augustin Thierry, né en 1843, qui commença une carrière
littéraire avec des articles sur Les Révolutions d'Angleterre en 1864 et des
Essais d'histoire religieuse en 1867, se consacra, par la suite, à
l'écriture de nouvelles.
Sa
biographie sur Wikipédia.
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